Avec la végétalisation, les toitures dites cool roof (toitures fraîches) sont l’une des réponses pertinentes pour rafraîchir la ville en été. Sans compter leur contribution non négligeable à la réduction des consommations liées à la climatisation.

 Les toitures cool roof reprennent un principe ancestral utilisé dans certaines régions chaudes du globe : réfléchir l’énergie du soleil avec des matériaux clairs qui ne stockent pas la chaleur. Membrane PVC blanche et collée, Soprema Entreprise, centre nautique L’Odyssée, à Aulnay-sous-Bois (93).
Photo : Sydney Zaggoury

Les fortes chaleurs, la densifi­cation et l’artificialisation des sols aggravent le phénomène connu désormais sous l’acronyme ICU pour « îlots de chaleur urbains ». Soit l’élévation notamment la nuit de la température de l’air et des surfaces par rapport aux zones périurbaines ou rurales. L’été que nous venons de vivre a montré l’importance des différences de température entre ville et campagne. Ces îlots de chaleur impactent au minimum le bien-être de ceux qui les subissent, au pire leur santé. Sans oublier leur effet néfaste sur la biodiversité, animale et végétale. La faute à qui ? L’activité humaine, au sens large, est la grande responsable. Plus précisément, on peut pointer du doigt l’inertie des matériaux de construction des bâtiments, des voiries et autres infrastructures, la minéralité des sols au détriment de la végétation, les dégagements de chaleur issus des systèmes de climatisation, des industries, des voitures…). Et aussi, la conception même des villes voies de circulation importantes et tous les phénomènes qui entravent la convection (mode de transfert de chaleur). Petite note d’optimisme : l’émergence d’une prise de conscience de ces problématiques et des enjeux qui y sont liés. Aujourd’hui, on sait que, parmi les facteurs aggravants des ICU, les matériaux (bitume, béton, revêtements de façade et de toiture, etc.) tiennent une part importante. Car ils stockent la chaleur pendant la journée 15 à 30 % de plus que dans les zones rurales (source Cerema) et la « relarguent » la nuit. Résultat : les températures extérieures nocturnes ne baissent pas, engendrant de l’inconfort.

 Durant les pics de chaleur en été, l’écart de température entre une toiture recouverte d’un revêtement traditionnel et une toiture cool roof peut atteindre 40 °C. Ce système permet de réduire jusqu’à 50 % l’impact du bâtiment sur les effets d’îlots de chaleur urbains. Membrane cool roof Sika.
Photo : Sika

Toitures de couleur claire

À défaut de supprimer ces effets néfastes, certaines solutions permettent au moins de les atténuer. Par exemple, le recours à des matériaux plus neutres et peu stockeurs. Et ceux dédiés à la couverture, plus particulièrement aux toitures terrasses, sont en première ligne. On pense, bien sûr, à la végétalisation intéressante sur ce plan, mais il existe une autre option : la technologie des couvertures fraîches (cool roof). Ces toitures de couleur claire, voire entièrement blanches, réfléchissent le rayonnement solaire sans trop stocker de chaleur, diminuant ainsi la température de surface. Une baisse qui a un impact direct sur les îlots de chaleur en milieu urbain puisque la végétation – quand il y en a ! – peut jouer pleinement son rôle, c’est-à-dire rafraîchir la ville durant la nuit. Demeurant fraîches en dépit de l’ensoleillement, ces toitures autorisent une réduction de 50 % de l’impact du bâtiment sur les effets d’ICU, mais aussi de ses conséquences sur la pollution de l’air et la santé. 

 Comme un revêtement de toiture classique, les toitures fraîches s’entretiennent au moins une fois par an pour éliminer les feuilles et autres salissures. Dans tous les cas, la pente doit être d’au moins 2 % pour éviter la stagnation des pollutions diverses. Il existe des revêtements cool roof autonettoyants. Membrane Ultraply TPO Firestone.
Photo : Firestone

Autre effet positif sur les pics de consommation électrique, dont la climatisation des bâtiments est en partie responsable : en sous-face d’une toiture cool roof, la température intérieure des locaux est de 2 à 3° C inférieure à celle d’un bâtiment qui en serait dépourvu. Résultat : 15 à 20 % d’économies sur la consommation d’énergie de rafraîchissement et/ou de climatisation, et autant de réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES), responsables du réchauffement climatique. Ces toitures s’avèrent également plus durables, les températures de surface plus faibles endommageant moins les membranes. Cela dit, la principale création de valeur de la toiture cool roof est la lutte contre les îlots de chaleur urbains. Un argument de poids pour les maîtrises d’ouvrage publiques auxquelles il incombe de concevoir des bâtiments assurant le confort global des usagers.

Multiplicité des systèmes

Les technologies disponibles sont adaptées à l’ensemble des procédés classiques d’étanchéité. À disposition, des membranes d’étanchéité bitumineuses ou synthétiques avec finitions cool roof, des gammes d’étanchéité liquide, voire des systèmes peintures cool roof. Selon le type, une toiture fraîche peut réfléchir jusqu’à 97 % du rayonnement solaire. En outre, ce type de couverture peut se coupler à des panneaux solaires photovoltaïques bifaciaux, augmentant ainsi la production d’électricité renouvelable grâce à la réflexivité du revêtement de toiture. Pour les maîtres d’ouvrage de bâtiments industriels et commerciaux, qui ont l’obligation de mettre en place des installations photovoltaïques en toiture, l’option est triplement vertueuse : elle limite le transfert de chaleur à l’intérieur du bâtiment en période de forte chaleur ; la réflectivité de la membrane d’étanchéité permet de récupérer la lumière pour stimuler la face arrière des panneaux solaires et augmenter la production d’électricité ; enfin, c’est une réponse certes partielle mais une réponse quand même à la problématique des îlots de chaleur. Avec ou sans panneaux solaires, l’ensemble des systèmes commercialisés sont sous Atex ou Avis techniques et répondent aux exigences réglementaires et sécuritaires, notamment la sécurité incendie.

Stéphane Miget

Le système CoolRoof de Cool Roof France est constitué de deux produits complémentaires, qui s’appliquent sur la plupart des matériaux utilisés en toiture : application mécanique (pulvérisation au pistolet airless) ou manuelle (rouleau, brosse).
Photo : Cool Roof France
 Couplage cool roof et panneaux photovoltaïques (cool roof Sika) : la température intérieure de l’étage sous toiture est plus basse de 2 à 3 °C, par rapport à une toiture classique. Soit 15 à 20 % d’économies sur la consommation d’énergie de rafraîchissement et de climatisation.
Photo : Sika

Un peu de physique

Schématiquement, l’énergie solaire est divisée en deux parties distinctes : la première est le spectre visible du soleil et la seconde, le spectre des infrarouges. Les propriétés d’un système de couverture cool roof sont mesurées sur la capacité d’un matériau à réfléchir le spectre visible et le spectre infrarouge. Soit des revêtements à fort albédo, valeur indiquant la quantité d’énergie solaire incidente qui est réfléchie par une surface donnée. On utilise une échelle graduée de 0 à 1 – 0 correspondant au noir pour un corps dépourvu de réflexion et 1 étant le miroir parfait – sur le spectre solaire et à forte émissivité dans le lointain infrarouge. Ces caractéristiques optiques sont des propriétés de surface des matériaux, sur 30 ou 40 micromètres. Traduction : les matériaux blancs en surface n’accumuleront pas la chaleur des infrarouges et éviteront le stockage dans l’enveloppe du bâtiment. À noter, les organiques polymères sont plutôt bien adaptés.

Ces articles sont extraits de 5Façades 156, découvrez le numéro en intégralité sur la plateforme Calameo.com