Fédérer des édifices existants entre eux, y inclure une nouvelle entité, tout le travail des architectes de l’agence Studios Architecture, pour le Campus Highlight à Courbevoie (92). Pour y parvenir, ces derniers ont créé plusieurs typologies de façades, qui associent un panel de matériaux mis en œuvre en mur-rideau, pare-soleil, parement et habillage structurel. L’objectif : harmoniser les expressions architecturales.

Face à la Seine, le bâtiment Quai restructuré présente des façades en mur-rideau de verre trempé avec couche réfléchissante, clair pour les parties courantes et émaillé opaque bleu pour les allèges, une extension étant créée en partie basse.
Photo : Stefano Candito/Studios Architecture

L’opération tertiaire d’envergure Campus Highlight est implantée à Courbevoie (92), à proximité de la Défense et en bordure de Seine. Conçu par l’agence Studios Architecture, le projet de restructuration-construction complexe, débuté en 2017 et livré en 2022, porte sur la rénovation de trois bâtiments existants et la construction d’un quatrième. « Le projet atteste d’une stratégie urbaine et architecturale efficace pour faire dialoguer des bâtiments isolés autour d’une nouvelle transversalité reliant la Seine à la ville, expliquent les concepteurs de Studios Architecture. Il relève le défi de les réunir et d’y adjoindre une construction logeant une résidence hôtelière pour créer un campus de 31 500 m2. » L’un de ces édifices en place est la tour Canon qui, réalisée en 1963 par l’architecte Jean Tschumi, marque l’entrée sur la Seine. S’élevant à 55 m de haut, cet immeuble de bureaux, ou bâtiment Quai, de 14 étages et 15 000 m2 (27 x 71 m) a été entièrement rénové et complété d’une extension de quatre niveaux sur sa partie ouest pour héberger le nouveau siège de Kaufman & Broad. Si le deuxième bâtiment des restaurants (R+1) de 10 m de haut (18 x 37 m) borde un vaste jardin (850 m2), le troisième bâtiment Industrie (70 000 m2) de 8 étages et 34 m de haut (12 x 60 m) se tourne vers la ville. La dernière entité, refermant l’ensemble, est une résidence hôtelière (R+6) de 7 000 m2 et 22 m de haut (35 x 47 m) bâtie en cœur d’îlot.

 Abritant le siège de Kaufman & Broad, l’ancienne tour Canon entièrement rénovée est pourvue d’un auvent blanc à arêtes brisées qui protège l’entrée principale longeant le quai du Président-Paul-Doumer.
Photo : Stefano Candito/Studios Architecture
 La façade ouest de la résidence hôtelière compte des murs béton isolés par l’extérieur, revêtus d’un parement en briques plates ou en relief.
Les châssis menuisés en métal laqué gris sont cernés de cadres saillants.
Photo : Stefano Candito/Studios Architecture
 La structure béton existante du bâtiment Industrie a été rhabillée de modules préfabriqués en béton blanc fibré en forme de U, posés à l’horizontale et à la verticale. L’édifice insère l’accès à la résidence Staycity.
Photo : Stefano Candito/Studios Architecture

Terrasses accessibles et végétalisées

Ouvrant sur un parvis, l’entrée principale au RDC du bâtiment Quai (sud), située sur le quai du Président-Paul-Doumer, face à la Seine, donne accès à un hall d’accueil à double hauteur protégé par un auvent et assorti de bureaux, d’un PC de sécurité et d’un café. Sa batterie d’ascenseurs distribue les différents étages tertiaires qui regroupent des espaces de travail, des salles de réunion, des rangements, des blocs sanitaires, des foyers…, répartis sur le pourtour du noyau central de desserte. Il profite d’une ample terrasse accessible placée dans l’angle ouest au R + 5 de l’annexion et d’une autre terrasse au R + 15, ainsi que de balcons filants déployés en façade, aux R + 4, R + 5 et R + 15. À l’arrière et à l’est de cet immeuble à grande hauteur (IGH), le bâtiment central de services d’un étage (1 000 m2) rénové est accolé à un jardin paysager. Il abrite, au RDC, un restaurant et un scramble (self-service) ainsi qu’une cuisine et des sanitaires, et à l’étage, une salle à manger et une laverie. Au nord, le bâtiment Industrie, du nom de la rue éponyme, a été réhabilité en immeuble tertiaire, avec son RDC abritant un hall d’accueil et le reste de l’emprise un parking privatif et ses rampes d’accès. Les étages logent des bureaux, des espaces de coworking, des lounges (un par plateau) et des sanitaires, deux terrasses techniques se développant aux R+8 et R+9.

 Chaque angle de la façade ouest du bâtiment Quai est doté de loggias qui, munies de platelages bois, sont protégées par des garde-corps verriers et des pare-soleil en lames de verre sérigraphié ouvrant sur le paysage urbain.
Photo : Stefano Candito/Studios Architecture

Des matériaux nobles

Devant cet édifice, s’adosse la résidence hôtelière Staycity de 216 chambres, dispatchées sur 6 étages, de part et d’autre d’une circulation interne, et bénéficie de deux terrasses accessibles, d’une terrasse végétalisée et d’une autre technique au R + 7, faisant écho au patio planté (R + 1). Quant au traitement spécifique des façades, le choix de matériaux nobles mis en œuvre (verre, métal, brique, béton fibré) diffère d’un bâtiment à l’autre, afin de les singulariser, tout en les harmonisant. Pour le bâtiment Quai, sa structure en béton précontraint désossée est rhabillée – pour les poteaux et noyaux d’ascenseurs – de modules préfabriqués de CCV (composite en béton blanc fibré), en forme de U (ép./2 cm), posés à l’horizontale et à la verticale. Devant, le mur-rideau en verre trempé posé est rythmé par une trame de 90 cm de large. Le pignon ouest intègre dans ses angles des loggias empilées et protégées par des brise-soleil en lames de verre sérigraphié. Revêtu des mêmes modules de CCV, le bâtiment des restaurants est muni d’un étage technique réalisé en portiques d’acier coiffés d’une grille, insérant les équipements techniques : il est cerné de pare-soleil en lames de verre feuilleté sérigraphié, côté jardin. Concernant « la résidence hôtelière, visible depuis la place des Trois-Frères-Enghels, un langage plus résidentiel est proposé, avec ses divers appareillages de briques en plein, en creux et en relief, jouant plusieurs partitions, ajoutent les architectes. Cette construction a posé un vrai défi, car elle devait s’inscrire dans le bâtiment de bureaux contigu, malgré des hauteurs de dalles différentes. »

 En arrière-plan de la résidence hôtelière de 6 étages, se dresse l’imposant bâtiment Quai de 14 étages qui présente un immense mur-rideau en verre bleuté et un pignon assorti de loggias dotées de brise-soleil en verre.
Photo : Stefano Candito/Studios Architecture
 L’ancienne tour Canon devenue le bâtiment Quai compte plusieurs terrasses, comme celle, accessible et perchée au R + 15, qui bénéficie de vues imprenables sur la Seine.
Photo : Stefano Candito/Studios Architecture

Parements en briques blanches

Les concepteurs ont ainsi imaginé un système ingénieux de cadres métalliques, dans lesquels les fenêtres s’implantent à diverses hauteurs pour retrouver un alignement. Édifiée en ossature béton avec des voiles et dalles coulés en place, cette résidence compte des façades isolées par l’extérieur et revêtues d’un parement en briques posé en relief ou de façon plate, selon leur emplacement. De plus, ont été installés des moucharabiehs en bardeaux de terre cuite et structure de métal qui filtrent la lumière et le soleil. Pour chaque ouverture, un châssis menuisé métallique laqué gris brun, accolé à un panneau en métal jaune, est ceinturé d’un cadre métallique saillant qui anime la cimaise de façade. Sur le plan environnemental, le projet vise les certifications suivantes : la norme NF Bâtiment Tertiaire HQE Rénovation « Excellent », et les labels BBC Effinergie Rénovation « Excellent » et Well Core & Shell « Gold » (bâtiments Quai et Industrie), ainsi que le BREEAM Refurbishment « Very good » (bâtiments Quai et Industrie, restaurant) et le BREEAM New Construction (neuf) « Very good » (résidence Staycity). Enfin, le campus a été nominé au Grand Prix Simi 2022 pour la catégorie « Immeuble rénové ou réaménagement particulièrement innovant ».

Carol Maillard

TRIPLE APPAREILLAGE DE BRIQUES

Les façades de la résidence hôtelière sont dotées d’un parement de briques en terre cuite naturelle blanche engobée lisse mis en œuvre de trois manières différentes, dont deux à l’aide du système de façade ventilé StoVentec. Chaque voile en béton isolé reçoit une plaque métallique fixée mécaniquement, sur laquelle sont collées des briques plates. En variante, pour les briques en relief, dont la forme en pointe a nécessité de créer un moule spécifique, elles ont été posées suivant ce même procédé. Quant aux moucharabiehs, installés en façade des escaliers ouverts et des zones techniques, ils servent à éclairer et ventiler les locaux. Ils se composent de bardeaux en terre cuite similaires, posés en quinconce sur une ossature de support d’un dispositif de brise-soleil, formé de montants en acier laqué blanc et de pattes de fixation, ce procédé étant sous avis technique. 

Plan, élévation et coupe sur un mur en briques de la résidence hôtelière
Doc. : Studios Architecture

 

Photo : Stefano Candito/Studios Architecture

LOGGIAS PROTÉGÉES PAR DES BRISE-SOLEIL

Le pignon ouest de l’IGH rénové (ex-tour Canon), de 30 m de hauteur, comprend des loggias placées dans ses angles, de part et d’autre des ascenseurs. Elles sont équipées de brise-soleil en lames de verre sérigraphié à points blancs – de 3,25 m de hauteur, posées tous les 90 cm –, qui passent devant les voiles béton des noyaux d’ascenseurs et les paliers pour unifier et dynamiser la façade. Ces lames sont fixées sur les rives des passerelles en planchers collaborants – alliant des bacs acier à des plots, des lambourdes et un platelage bois –, via des attaches en métal. Le plafond extérieur se pare d’un panneau Aquapanel, en ciment et fibres de verre.

Coupe sur une loggia du pignon ouest du bâtiment Quai
Doc. : Studios Architecture

STUDIOS ARCHITECTURE

 

Photo : Stefano Candito/Studios Architecture

« Le projet complexe a mis en œuvre plusieurs approches constructives, en fonction des typologies de bâtiments. » « L’enjeu du projet est de redessiner un morceau de ville dans un site dense, en bord de Seine, entre quartier d’affaires et résidentiel. Il s’agit de transformer un ensemble tertiaire minéral des années 1960-1980 en un projet à échelle humaine, mixte, qui remet la nature au cœur de la ville. Nous avons fait dialoguer trois immeubles isolés, dont l’emblématique tour Canon de Jean Tschumi, autour d’une nouvelle transversalité reliant la Seine à la ville, avec un axe qui privilégie la transparence, et prend en compte les flux et connexions. Nous avons ajouté une extension sur la tour principale et adjoint au campus une construction neuve pour accueillir une résidence hôtelière et créer un campus urbain fluide, autour d’un jardin planté. Le projet complexe a mis en œuvre plusieurs approches constructives, en fonction des typologies de bâtiments. L’ensemble des façades a été redessiné afin de créer une cohérence entre les bâtiments et leur donner une nouvelle identité, dans le respect de l’existant. Pensé sur plusieurs échelles et matérialités, Highlight redéfinit un quartier avec trois écritures complémentaires : la résidence en appareillage de briques, l’immeuble rue de l’Industrie en modénature de modules de CCV et le bâtiment Quai qui offre un nouveau signal au front de Seine. Il se démarque par sa clarté et sa façade tramée en verre rendant hommage aux années 1970, et offre un autre visage, avec son extension, sa faille dynamique et son auvent brisé qui apportent une respiration et une singularité d’expression dans la skyline des quais. »

  • PROGRAMME Opération Campus Highlight de restructuration-reconstruction de bâtiments tertiaires à Courbevoie (92)
  • Promoteur : Kaufman & Broad
  • Maîtrise d’œuvre : Studios Architecture
  • MOEX : Builders & Partners
  • BET fluides : Barbanel
  • BET acoustique : Elithis
  • BET environnemental : Bénéficience
  • BET façades : Ceef (Conception et études européennes de façades)
  • Économiste : CV Ingénierie
  • Paysagiste : Land’Act
  • Préventionniste : Batiss
  • BET ascenseurs : A9C
  • BET études génie écologie : Dervenn
  • BET restauration : Influence Restauration
  • Entreprises : Gros œuvre/lots archi : Créatis (Spie Batignolles/Fayat) ; façades : Goyer/Seralu ; fluides : Vinci Énergie

Cet article est extrait du magazine 5Façades 159 disponible en intégralité sur Calameo.