Résoudre le triptyque isolation thermique, acoustique et contrôle solaire, sans nuire à l’esthétique et à l’intégration en façade, passe par les menuiseries dites « respirantes ». Une technologie très encadrée, qui fêtera l’année prochaine son quarantième anniversaire.

Le principe de respiration appliqué aux menuiseries avec vitrages isolants et son fonctionnement ont été définis par deux ingénieurs du Centre technique et scientifique du bâtiment, Gérard Fleury et M. Thomas, et formalisés dans la publication du Cahier 1964 du CSTB en décembre 1984. Une solution franco-française encadrée, aujourd’hui encore, par un « Cahier des prescriptions techniques de conception des fenêtres et façades légères respirantes » du CSTB. Publié en janvier 2015, ce document très complet est à même de fournir aux maîtres d’œuvre, maîtres d’ouvrage, façadiers et fabricants, une information complète et fiable sur cette technique particulière, très prisée dans notre pays. Il définit ainsi les dispositions applicables et nécessaires au bon comportement des menuiseries avec lame d’air respirante, lesquelles font l’objet d’une évaluation technique : DTA (Document technique d’appli­cation), Avis technique ou ATEx.

Sachant qu’il n’existe pas de norme ni de référentiel européen ou français pour le système de respiration appliqué aux fenêtres ou aux façades légères. Les ouvrages utilisant cette technologie sont donc considérés comme non traditionnels. Ils doivent néanmoins être conformes à la norme produits NF EN 14351-1 et à la NF DTU 36.5 pour les fenêtres ; à la norme produit NsF EN 13830 et à la NF DTU 33.1 pour la façade légère. Depuis 1984, les industriels du secteur n’ont eu de cesse de faire évoluer le procédé, qui intègre toutes les évolutions technologiques des vitrages et les profilés aluminium les plus performants.

Salle omnisport de Langueux, 24 châssis respirants Wicline 115 AFS de 1200 x 2500 mm (Wicona), avec stores motorisés reliés à la GTC.
Photo : Patrick Loubet

Système monobloc

Pourtant, la définition donnée par le CSTB à l’époque n’a pas changé : « La respiration consiste en l’équilibrage des pressions partielles de vapeur d’eau entre une lame d’air limitée par deux parois vitrées vision et l’extérieur du bâtiment. Cet équilibrage est réalisé par des orifices placés sur une même ligne horizontale. » Autrement dit, ce système monobloc d’environ 20 cm d’épaisseur se compose d’un double vitrage côté intérieur, d’une lame d’air pouvant intégrer une protection solaire (en général un store vénitien) et d’une vitre extérieure. Il comporte aussi des prises d’air permettant d’équilibrer les pressions de vapeur d’eau entre l’extérieur et la lame d’air, évitant ainsi tout phénomène d’embuage. Les lumières (orifices) sont placées généralement en traverse basse. La lame d’air respirante tend à se mettre en équilibre avec l’extérieur, via les orifices de respiration. Dans les climats tempérés, la migration de l’humidité se fait, en hiver, de l’intérieur vers l’extérieur, c’est-à-dire de l’ambiance la plus chargée en humidité vers la moins chargée.

C’est dans ce but que le plan d’étanchéité à la vapeur d’eau contenue dans l’air doit être particulièrement soigné. Le système de respiration peut être utilisé pour les remplissages des vitres de fenêtres ou façades légères pour tous types de bâtiment. Cette technologie est d’autant plus efficace si les dispositifs de respiration offrent une grande perméance et si la perméabilité à l’air de la paroi intérieure de la lame d’air est faible, peut-on lire dans le Cahier des prescriptions techniques. Perméabilité qui doit généralement rester inférieure à 0.5 m3/(h.m-2) sous 100 Pa. Sachant que lesdits dispositifs de respiration sont équipés de filtres à mailles de 100 à 500 μm, afin de limiter l’introduction d’insectes ou de particules (poussières, pollen…) dans la lame d’air. L’efficacité est encore améliorée – avec pour corollaire, un nombre moindre de filtres – si le cheminement est plus direct, à savoir le moins de coudes possibles et sans changement de sections. Ceux-ci doivent rester accessibles pour leur nettoyage ou changement. Avantage : la lame d’air en lien avec l’extérieur ne subit aucune déformation. Comme il n’y a pas d’écart de pression, la façade reste parfaitement plane. Les parties fixes et ouvrantes sont confondues, préservant ainsi le design de l’ensemble.

Polyclinique Courlancy, Reims (51), Jean-Michel Jacquet architecte : les menuiseries des chambres bénéficient de larges ouvertures dotées de menuiseries respirantes avec store intégré pour le confort des malades.
Photo : Michel Denancé

Plan de qualité validé

Les façades et menuiseries respirantes fonctionnent bien, à condition que certains points de conception, de fabrication et de qualité – notamment pour les stores et l’étanchéité à l’air de la partie intérieure de la paroi – soient validés. Cet aspect a été posé par les rédacteurs du « Cahier des prescriptions techniques de conception des fenêtres et façades légères respirantes ». Pour eux, il est important de reconnaître les signes de qualité des entreprises. Ainsi, le CPT impose que les fabricants concernés prouvent qu’ils ont bien mis en place un plan de qualité validé par un organisme extérieur, à l’instar des VEC. D’autre part, le document livre une information précise sur la technique. Des points de détail qui ont leur importance. Par exemple, le nettoyage des vitrages avant la pose et leur manipulation avec les ventouses pour ne pas laisser de traces.

 

B612, Toulouse, Kardham Cardete Huet Architecture. Le traitement thermo-acoustique de l’enveloppe est obtenu par une isolation extérieure et des menuiseries dotées de triples vitrages respirants, avec stores intégrés orientables.
Photo : Arnaud Späni
Même attention lors de la mise en place des filtres, ceux-ci ne doivent pas être bouchés. Point technique probablement le plus sensible, la possibilité de démonter pour accéder à la lame d’air en cas de changement d’un store défectueux. Dans ce cas-là, il est nécessaire de déparcloser et de déposer le double vitrage, ce qui ne peut être accompli par une personne seule en raison du poids. En outre, il est indispensable de bien maîtriser la technique pour assurer une parfaite étanchéité au remontage. Ainsi certains façadiers et storistes ont développé des partenariats avec mise en place de plateformes d’essais équipées de châssis respirants pour peaufiner et étudier leur comportement.

Intégration des stores vénitiens

Le SNFA, la FFB Fermeture et Store (aujourd’hui groupement Actibaie) et le CSTB ont établi des recommandations pour pallier les problèmes de mise en œuvre des stores vénitiens. Intitulé « Cahier des prescriptions techniques de conception des stores vénitiens intégrés entre vitrages non scellés », le document spécifie les principales prescriptions techniques liées à leur utilisation intégrée dans les lames d’air respirantes, dans les façades très faiblement ventilées et dans les lames d’air non scellées, étanches à la pluie. Il décrit les exigences complémentaires à la norme NF EN 13120 relative à ce type de stores, du fait des difficultés d’intervention ultérieure et des conditions hygrothermiques. En effet, si ces éléments mobiles constitués de différents composants (lames, échelles, moteur, etc.) ne nécessitent pas d’entretien particulier, leur durabilité reste, en revanche, inférieure à celle de la façade. Leur usure entraîne donc une maintenance, voire leur remplacement complet. C’est pourquoi le document précise qu’une attention particulière doit être apportée à l’accès aux stores, dès l’étude préalable du système. Ces exigences complémentaires ont aussi pour objectif de limiter les risques de défaillance des stores, tels les faux niveaux, l’usure des cordons et des échelles, la chute de composants, le déréglage des fins de course ou encore la panne de moteur. Dans une démarche de réflexion globale, les recommandations portent aussi sur le transport, la manutention et le stockage des produits.

Ne pas confondre menuiseries respirantes et pariétodynamiques

La fenêtre pariétodynamique, appelée aussi fenêtre dynamique, pourrait ressembler à une menuiserie respirante ; en réalité, elles n’ont rien à voir. Cette technologie, dont le principe pourrait être celui du mur trombe appliqué à la fenêtre, tire sa particularité dans la présence d’un flux d’air qui circule entre les trois vitrages formant le vitrage isolant. L’air extérieur pénètre dans la fenêtre par une grille d’aération fixée sur sa paroi externe, dans le haut de la menuiserie, puis circule entre le second et le troisième vitrage.

 

Dédié aux projets à fortes contraintes énergétiques, Kalory E reprend le principe de la fenêtre pariétodynamique, mais en y ajoutant trois brevets. L’idée : réduire les coûts d’installation, de maintenance
et d’énergie.
Photo : Kawneer
Chauffé entre les parois vitrées par le soleil et/ou par la température intérieure de la pièce, il pénètre dans le local par l’intermédiaire d’une bouche d’entrée d’air autoréglable, située en partie haute de la menuiserie pour ne pas gêner les occupants. En été, la température de la lame d’air intérieur est supérieure à celle de la lame d’air extérieur, le sens de circulation de l’air s’inverse. Ce phénomène peut être accentué en générant une légère surpression dans les locaux. Une baisse de 4 °C de température est alors possible. Des études réalisées par l’Ademe ont mis en évidence une réduction des consommations d’énergie de l’ordre de 25 %. Les expérimentations montrent que les déperditions sur l’air neuf sont réduites de plus de 50 % par rapport à une entrée d’air statique à la température, pour un débit de 15 m3/h et par fenêtre.
Cet article est extrait du magazine 5Façades 161 disponible sur Calameo.