La façade à ossature bois (FOB) est souvent avancée au démarrage des projets comme la nouvelle évidence. Il est vrai que, depuis 2020, ce système constructif dispose enfin d’un DTU, d’un recueil de solutions contre la propagation du feu ayant valeur d’avis de laboratoire, et de tous les atouts nécessaires à la conception d’un projet de façade bas-carbone.
Les systèmes de façade à ossature bois (FOB) disposent de plusieurs décennies d’expériences menées de front par des entreprises, bureaux d’études, architectes et maîtres d’ouvrage précurseurs. Le travail des organismes de promotion de la filière, pour exemple, le Comité national pour le développement du bois (CNDB), les publications de Jean-Marc Pauget et l’engagement de Jean-Michel Perrin plus tard en entreprise, ont beaucoup fait pour diffuser une culture des systèmes constructifs de façade en bois et mettre en relation ses acteurs. Pourquoi recourir à ce type de façade ? Les réponses sont assez simples.
La façade à ossature bois utilise un matériau qui rassemble structure et isolation dans une même épaisseur et qui « pousse » à l’énergie solaire. Elle se prête bien à la préfabrication d’éléments de grande surface, d’environ 15 m². Cela favorise les chantiers courts et silencieux, surtout lorsqu’il s’agit de construction en milieu urbain ou de réhabilitation en site occupé. Si le reproche qui lui est souvent fait est que le bois n’y est pas visible, les systèmes à ossature, que l’on peut opposer aux panneaux transformés et potentiellement apparents (LVL, CLT, LSL), font eux aussi appel à une ressource gérée durablement. Sa relativement faible transformation en matériau pour ossatures le prête bien à la démontabilité et au réemploi.
Autre question : tout a-t-il été fait ?
L’ossature nécessite d’envisager la conception d’une façon analytique et de coordonner, pour y parvenir, la construction de l’ouvrage avec la composition architecturale. Ainsi, associer le DTU 31.4 et le projet architectural n’est pas toujours aisé, de même que les interprétations encore jeunes du texte doivent trouver les solutions qui font consensus. La plupart d’entre nous ont une idée préconçue d’une FOB qui sera à peu près formulée comme ceci, d’après cet extrait du DTU 31.4 et appréciation de laboratoire du CSTB : « C’est un panneau opaque à hauteur d’étage, (souvent) percé d’une fenêtre. » Les illustrations qui servent d’exemple aux normes cristallisent la représentation du système en une seule solution et ont tendance à faire oublier la multitude des possibles que ces mêmes référentiels permettent d’envisager (cf. extrait Essais de Laboratoire CSTB, Guide Rage, DTU 31.4).
Or en faisant un peu travailler notre imagination, certaines dimensions, proportions conduisent à des aberrations. De même, l’interface avec la fenêtre n’est pas l’exception, mais la règle. Les projets de tous les jours renvoient à ces questions :
- Comment, dès lors, transporter les façades préfabriquées lorsque la hauteur de transport dépasse la limite de 4 m 10 des routes nationales, soit une hauteur entre étages ou une hauteur de panneau de 3 m 20 ?
- Comment fabriquer ces panneaux toujours trop hauts ou trop larges pour les compagnons qui les montent en atelier ?
- Comment éviter de transporter 60 % de vide sur les routes lorsque la préfabrication est partielle ?
- Comment s’adapter aux déformations importantes ou incertaines des planchers, à fortiori en construction à poteau-poutre en bois ?
- Comment réaliser une bande filante menuisée qui ne sera pas perturbée par d’importantes interruptions de meneaux ?
- Comment éviter de démultiplier les linéaires d’interface et de joints ?
- Comment mener une réalisation vraiment économique et utiliser tous les avantages d’un voile ou d’une allège en béton, ce qui arrive souvent en rénovation ?
EXPLORER LES SOLUTIONS
RÉSIDENCE LOUISE-BOURGEOIS
- Architectes : Béal & Blanckaert
- Réalisation : 2015
- Construction : neuve
- Entreprises : Bouygues ; Belgometal du groupe Kyotec (sous-traitant) La résidence Louise-Bourgeois est un des archétypes de la façade à ossature bois.



Une façade modulaire
De conception modulaire, tant par sa composition (un module de façade = un logement) que par sa préfabrication, cette façade pourrait illustrer l’a priori évoqué précédemment. Cette construction qui précède l’édition du DTU 31.4 en dépasse, avec ses 38 m de hauteur, le domaine d’application limité à 28 m au plancher. Elle a bénéficié d’une Atex et d’un avis feu favorables, portés par Belgometal du groupe Kyotec, encadré en sous-traitance par Bouygues. La compacité et la légèreté de cette technicité de façade l’ont emporté sur d’autres solutions en compétition jusqu’en phase exécution ! Si beaucoup d’histoires architecturales et techniques peuvent être racontées, la faisabilité de cette histoire commence… avec une hauteur d’étage entre planchers ≤ 3,20 m compatible avec un gabarit de transport de 4,10 m.

Levage et transport
Surtout, si leur mise en œuvre sur site est efficace, ce n’est pas du tout l’impression que donnent les visites d’ateliers sur ou sous-exploités, avec de grands panneaux peu ergonomiques et peu faciles à assembler.

Montage sur table
CAMPUS DE COULOMMIERS
- Architecte : Patrick Mauger
- Réalisation : démarrage en juin 2024
- Construction : mixte neuf et réhabilitation après curage amiante

La conception des façades neuves et en réhabilitation du lycée polyvalent Jules-Ferry-et-Georges-Cormier à Coulommiers interroge la notion de hauteur de préfabrication et de bande filante menuisée. La hauteur entre niveaux sur la partie neuve de 3 m 68 > 3 m 20 incompatible avec une hauteur de transport maximale de 4 m 10 en position debout, et la composition générale de l’ensemble formant de longues allèges, ont conduit à imaginer des caissons préfabriqués horizontaux en appui sur les dalles et les poteaux de charpente. C’est une inversion du principe usuel d’une FOB de portée verticale de dalle à dalle vers une ossature de portée horizontale en appuis sur les poteaux.

Vers une conception horizontale de la façade
En conséquence, ce principe de FOB permet d’envisager la pose des façades par niveaux et d’organiser les travaux sur site par strates horizontales d’intervention en séparant les façades bois des menuiseries. Ce type d’organisation du clos et couvert est également mieux adapté à la pose des finitions intérieures en comparaison d’une pose par façades.

Une résolution simple
État existant, en cours de pose et finalisé
À l’inverse de la solution précédente, l’immeuble dispose d’allèges béton ayant toutes les qualités requises d’étanchéité à l’air, à l’eau et à la vapeur, de C + D. La FOB se limite en hauteur à l’encadrement des baies dans le principe de la « façade interrompue à isolation extérieure continue » mentionnée dans le DTU 31.4. Ces ossatures bois se substituent au précadre métallique usuel, et réduisent le pont thermique de liaison de la menuiserie au gros œuvre.
Bien que non nécessaire à l’époque du permis de construire pour cette rénovation de logements datant d’avant 2019, les détails ont respecté par anticipation les derniers avis de laboratoire concernant la propagation du feu par les façades. Une fois les FOB posées, les appuis de bardage sont réalisés.

Plus besoin de fixations complémentaires dans les murs ! Il résulte de cette mutualisation des composants que permet la FOB en réunissant précadre avec l’ossature support de bardage :
- Une réduction des délais
- Une amélioration des performances thermiques de la paroi opaque
- Et, surtout, le confort acoustique !
UN CAS D’ÉCOLE
Architectes : ATW
Réalisation : études 2024
Construction : rénovation de bureaux en site occupé
Cette rénovation synthétise les apports des projets précédents et intègre une notion de protection solaire variable avec l’inclinaison du bardage en allège.
Le bâtiment existant dispose d’un système porteur à poteau-poutre
L’ossature bois dont la forte épaisseur imposée par son isolation thermique lui permet de résister aux charges de vent entre poteaux, est équipée d’un arbalétrier pour le report des charges verticales directement sur les axes porteurs. Cette disposition structurelle permet de s’affranchir de dalles trop souples ou dont les caractéristiques sont inconnues.
Des trumeaux indépendants complètent le système.


KHN
Un autre type de préfabrication intermédiaire, plus compact encore, s’inspire directement des khana : ensemble des murs de la yourte mongole et leur treillis de bois repliable. Cet habitat démontable se range en faisceaux facilement transportables par petits convois. L’idée est, ici, de concevoir un système économe en matière avec ossatures regroupées par lots d’éléments sanglés et pare-pluie prémonté. Le système, facilement transportable en camionnette, est compatible avec une production dans de petits ateliers. La composition des montants en H autour d’écarteurs permet de réduire la quantité de matière, les ponts thermiques et le guide le montage. L’assemblage du pare-pluie et des sangles calibre le pas et le parallélisme des ossatures lors de leur déploiement.

« Construire autour de la baie » : principe et prototype éch. 1/3
Composer l’ossature bois par éléments autour de la fenêtre en distinguant les allèges autoportantes et les trumeaux complémentaires évite de devoir doubler le linéaire de joints au voisinage des trumeaux. Tout comme les FOB étroites limitées à hauteur de baie, les éléments à hauteur d’allège et les trumeaux complémentaires peuvent être préfabriqués simplement sur table ou sur bancs de montage. De cette façon, la fenêtre n’est plus le défaut d’une solution constructive imaginée comme une paroi pleine à percer, mais devient l’élément central de la composition technique.

Principe d’assemblage et de montage
La facilité de montage et la réalisation d’un clos et couvert rapide font l’intérêt de cette conception.

Cet article est extrait du magazine 5Façades 167 disponible sur Calameo.