Dossier réalisé par Stéphane Miget

Bois, métal, enduit, béton, terre cuite, panneaux composites, panneaux photovoltaïques, végétalisation… Les architectes n’hésitent pas à marier les matériaux et systèmes en façade. Loin d’être accessoire, cette tendance, intimement liée au développement des procédés d’isolation thermique par l’extérieur (ITE), se remarque sur l’ensemble des typologies de bâtiment. Aux yeux des concepteurs et maîtres d’ouvrage, ces associations ouvrent de nouvelles perspectives, tant au niveau esthétique en introduisant de la diversité que dans l’exploitation des propriétés intrinsèques de chaque matériau.

Photo : Bouygues Immobilier / Shoootin-photo

Présenté dans le cadre des prix décernés par la Fédération des promoteurs immobiliers de France (FPI), le projet Alma Terra a reçu, en 2020, la Pyramide d’Argent du bâtiment bas carbone. ABP Architectes.

Combiner matières et systèmes

Assembler les procédés de vêture, de bardage, brique de parement, béton, enduit en façade. Une tendance qui présente au moins trois avantages : esthétique, économique et technique. L’opportunité de s’intéresser à tous les systèmes façades, qui sont légion. « Nous cherchons à rompre la monotonie d’un bâtiment, à rehausser sa qualité architecturale, tout en lui apportant une identité propre. » C’est ainsi que nombre d’architectes expliquent la tendance que l’on observe depuis une quinzaine d’années : le recours, sur une même façade, à plusieurs procédés d’habillage, ITE sous enduit et façade ventilée. Sur le plan architectural, cette tendance en rejoint une autre : celle qui consiste à créer des volumes ou percements en façade, tels que boîtes, terrasses en retrait, loggias plus ou moins ouvertes… Des espaces mis en valeur par la différenciation des matériaux, qui provoque des ruptures de style ou de ton, l’idée étant de casser l’effet monolithique. Le jeu sur les volumes n’est pas systématique, le changement de matériaux suffit à mettre en valeur certaines parties – par exemple apporter davantage de légèreté en habillant différemment la partie supérieure d’une baie. C’est un moyen de créer une dynamique esthétique, des animations visuelles.

 Campus Highlight à Courbevoie, Studios Architecture. Pour redessiner un morceau de ville en fédérant les édifices existants et y inclure une nouvelle entité, les concepteurs ont créé plusieurs typologies de façades, qui associent un panel de matériaux nobles. Photo : Stefano Candito

« Nous cherchons à rompre la monotonie d’un bâtiment, à rehausser sa qualité architecturale, tout en lui apportant une identité propre. » C’est ainsi que nombre d’architectes expliquent la tendance que l’on observe depuis une quinzaine d’années : le recours, sur une même façade, à plusieurs procédés d’habillage, ITE sous enduit et façade ventilée. Sur le plan architectural, cette tendance en rejoint une autre : celle qui consiste à créer des volumes ou percements en façade, tels que boîtes, terrasses en retrait, loggias plus ou moins ouvertes… Des espaces mis en valeur par la différenciation des matériaux, qui provoque des ruptures de style ou de ton, l’idée étant de casser l’effet monolithique. Le jeu sur les volumes n’est pas systématique, le changement de matériaux suffit à mettre en valeur certaines parties – par exemple apporter davantage de légèreté en habillant différemment la partie supérieure d’une baie. C’est un moyen de créer une dynamique esthétique, des animations visuelles.

Carquefou (44), Jacques Boucheton Architectes (JBA) et David Juhel (The Architectes). Résidences l’Écrin, bâtiment blanc traité en différentes matérialités, et Haisia, mêlant lignes horizontales en béton peint, entrecoupées de châssis vitrés couleur bois. Photo : CA Immobilier / Groupe CIF

 

Nouveaux modes constructifs

Autre approche déjà évoquée dans ces pages, la descente de la couverture et donc de son revêtement sur toute ou partie de la façade. Ce qui permet d’assurer la conception d’une enveloppe homogène sur les plans esthétique et thermique. À noter que, dans la plupart des cas, la façade n’est que partiellement recouverte par le matériau de couverture, le reste recevant un autre type de revêtement qui tranche, esthétiquement parlant. Et les architectes ne sont pas les seuls à être friands de ces procédés. Les particuliers, lorsqu’ils créent une extension ou repensent l’esthétique de leur maison, adoptent souvent cette façon de différencier les espaces. Cela est d’autant plus facile que l’offre s’est démultipliée en termes de produits et systèmes. Si le mariage des matériaux en façade est désormais rentré dans les habitudes, c’est aussi en raison des nouveaux, et nombreux, modes constructifs. L’engouement pour la construction à ossature bois, la construction hors site, ou encore le développement de l’isolation thermique par l’extérieur (ITE) n’y sont pas étrangers. Ces approches demandent, en effet, un revêtement extérieur de qualité pour protéger le manteau isolant. Résultat : les industriels ont développé une grande variété de systèmes façades pour habiller les murs par l’extérieur, avec deux objectifs : apporter la résistance et la durabilité nécessaires, proposer une gamme de plus en plus étendue et esthétique. Tous les procédés sont concernés, des plus traditionnels – bardage bois, pierre naturelle, terre cuite, mosaïque – aux plus modernes, tels que les panneaux stratifiés et composites, ou encore les systèmes d’ITE sous enduit qui, avec leur large palette de couleurs et de structures, prennent toute leur place dans cet ensemble. Une aubaine pour structurer et façonner les façades en matière d’esthétique, les solutions mixtes offrant des possibilités de panachage quasi infinies.


Gérer les interfaces entreprises

Généralement, la mixité des matériaux en façade est toujours liée à la mise en place d’un système d’isolation thermique par l’extérieur (ITE). Ce qui, pour les entreprises de ravalement, apporte de la valeur ajoutée. La difficulté, c’est que, souvent, hormis quelques grands façadiers, elles n’ont qu’un domaine d’activité : celui de l’ITE sous enduit. Capter ce type de chantiers, où les entreprises de ravalement ont une légitimité à intervenir, suppose de développer une qualification dans le domaine de la façade ventilée. Pour l’entreprise, la principale différence, outre la mise en œuvre, résidera dans la préparation du chantier en amont qui requiert davantage de temps, notamment pour l’étude de calepinage. Cela demande, bien sûr, de former des compagnons et implique d’avoir de nouveaux fournisseurs. Plus éloignées du métier de ravaleurs en revanche, toutes les techniques liées à la couverture et qui ont tendance à descendre en façade – tuile, ardoise ou zinc à joint debout – sont peut-être à laisser aux couvreurs. Par exemple, il n’est pas rare de voir sur un bâtiment de l’enduit, du zinc et du bois. Donc trois métiers différents. Souvent, c’est l’entreprise générale qui gère avec des sous-traitants spécialistes. Ce qui ne pose pas de soucis à partir du moment où la compétence et la qualification sont au rendez-vous. Concernant les interfaces entre les différents matériaux, c’est le rôle de l’architecte de les gérer en dessinant des détails de liaison esthétiques et conformes aux DTU et avis techniques de chacun des procédés. Ensuite, les entreprises les appliquent – le dialogue est évidemment indispensable.


Alma Terra, ABP Architectes. Traitement différencié : bardage bois, ITE sous enduit et bardage métallique. Photo : Bouygues Immobilier / Shoootin-photo

Maîtriser les coûts

Autre raison invoquée : le coût. La mixité des matériaux en façade rehausse la qualité architecturale de l’ouvrage sans que cela ait une incidence trop importante sur le budget. Le mélange des genres permet d’obtenir un rapport qualité/prix intéressant. Ainsi, la façade pourra être recouverte d’une ITE sous enduit qualitative mais à un coût moindre et, par ailleurs, être habillée ponctuellement par un système de vêture ou bardage ventilé davantage marqué esthétiquement, mais plus onéreux. C’est une option qui est retenue plus souvent qu’on ne l’imagine, notamment par les bailleurs sociaux soumis à des contraintes budgétaires fortes. Pour eux, ce choix, notamment lors de rénovations, valorise le patrimoine via une requalification architecturale. La difficulté étant, bien sûr, de ne pas donner l’impression d’une option par défaut, ce qui annihilerait l’effet esthétique recherché. Plus généralement, le choix, pour l’architecte, dépendra des critères habituels : la fonction du bâtiment… Et c’est toujours le contexte qui oriente le choix. La difficulté ? Rester harmonieux. L’œil ne doit pas s’arrêter sur un élément de la façade en particulier, mais glisser sur elle et la voir dans son ensemble. Il ne faut pas non plus être trop « bavard » : au-delà de trois procédés ou couleurs différentes, le risque est grand, comme l’expliquait l’architecte Hervé Posnic, Archicréa DP à Meaux (77), interrogé sur le sujet : « C’est comme composer un jardin : avec trois types d’essences de plantes, ça fonctionne, mais, au-delà, on ne s’y retrouve pas, ça ne marche plus. Autre élément très important, la maintenance et l’entretien des façades. Cela ne doit pas devenir un casse-tête, il faut raisonner en coût global. »

Crèche « Au creux des branches », Neufchâteau (Belgique) : « La crèche est conçue comme un monolithe noir, avec un seul matériau, une ardoise Cupa Pizarras, pour ne pas se perdre dans une ornementation excessive […]. Les baies colorées ponctuent cette enveloppe, telles des notes de musique […] », explique l’architecte Xavier Van Rooyen. Photo : Cupa Pizarras

Élargir la palette de couleurs

En ce qui concerne l’aspect technique, la mixité des matériaux permet de régler certaines difficultés, comme la résistance aux chocs. Le revêtement le plus fragile pouvant être relégué dans les parties hautes et remplacé en partie basse par un plus résistant. De même, bardages et vêtures ayant, dans la plupart des cas, une plus grande durabilité que les enduits, il peut être intéressant de les utiliser sur des parties de façade difficilement accessibles. D’où une limitation des opérations de maintenance sur le long terme dans les zones difficiles d’accès. Aspect technique également très important, la possibilité d’élargir considérablement la palette chromatique en façade – une autre des grandes tendances esthétiques concomitante au développement des systèmes d’ITE – sans que cela nuise au bâtiment. En effet, contrairement aux systèmes sous enduit, dont le spectre de couleurs est limité réglementairement pour éviter une absorption excessive du rayonnement solaire, les parements et bardages sont utilisables avec des teintes vives ou soutenues dans la mesure où leur sous-face est désolidarisée du bâti et donc ventilée.

Rénovation lourde de la cité étudiante Camille-Guérin à Limoges, GDV architectes urbanistes. Requalification des façades : ITE avec panneaux en polycarbonate de différentes couleurs et panneaux HPL. Photo : Cyril Badet / Louineau

Produits :

Finition autonettoyante StoTherm Mineral et StoLotusan / Sto Système d’isolation thermique par l’extérieur (ITE) sous enduit optimisé pour la protection incendie. Les panneaux de laine de roche fixés mécaniquement sur le mur support sont revêtus d’un sous-enduit mince à base de liant hydraulique, obtenu à partir d’une poudre mélangée à de l’eau, puis armé d’un treillis en fibres de verre. La finition est assurée par un revêtement StoLotusan doté de la technologie Lotus-Effect : les impuretés perlent sous l’action de la pluie, offrant ainsi à la façade une capacité d’autonettoyage.

Bardage anodisé naturellement Gamme Premium Anodised / Alucobond Nouvelle gamme de bardages haut de gamme avec surface anodisée naturellement. Il s’agit d’une oxydation électrolytique de l’aluminium qui affine le matériau grâce à un revêtement protecteur en oxyde. Cette technique, un traitement anticorrosion naturel, assure une durée de vie plus importante au bardage. Elle augmente également la dureté de surface, sachant que la protection croît en fonction de l’épaisseur de la couche d’anodisation (jusqu’à 25 microns). Les bardages se déclinent en trois séries d’anodisation naturelle en versions lisse, brossée ou structurée, et dans une palette de teintes claires et sombres, métalliques, dorées et cuivrées.

Bardage terre cuite engobée Argeton Inspirio / Wienerberger Nouvelles esthétiques pour les bardages de façades en terre cuite. Le procédé d’engobage associe les propriétés naturelles des matériaux de construction en terre cuite à un design contemporain. Soit un traitement de surface. Des pigments minéraux sont appliqués sur les panneaux en terre cuite avant le processus de cuisson. L’unité d’engobage digital du fabricant applique le dessin numérisé sur la terre cuite engobée. Lors du processus de cuisson, l’image appliquée fusionne avec l’engobe et le panneau pour former un élément inséparable.

 Rénovation façade de la résidence Marcel-Martinie, à Vanves (92)

 

Cet article est extrait de 5façade n°158 > Découvrir le numéro en intégralité <