Concilier la production d’électricité photovoltaïque via l’enveloppe du bâtiment et la qualité architecturale, c’est la condition du développement des constructions à énergie positive et décarbonées. Dans ce domaine, un seul principe : la technologie ne doit pas prendre le pas sur la qualité architecturale des ouvrages, elle est à son service et non l’inverse. D’ores et déjà, les procédés existent et apportent de véritables solutions esthétiques, très éloignées des panneaux photovoltaïques classiques posés en couverture. Déjà le marché se met en place avec deux tendances : autoconsommation et stockage.

Dossier réalisé par Stéphane Miget

Systèmes certifiés.

Les industriels du secteur, notamment les tuiliers, ardoisiers et producteurs de panneaux solaires, ont compris tout l’intérêt à promouvoir ce marché prometteur. Ils s’y engagent d’ailleurs sur deux axes : développement d’une offre produits de qualité tournée vers l’autoconsommation, en intégration totale ou non ; développement d’offres commerciales spécifiques pour accompagner les entreprises, constructeurs et couvreurs. Par exemple, outre des solutions techniques optimisées, simples à poser et fiables, ils mettent à leur disposition des programmes de formation et de monitorat et des outils associés à des guides spécifiques. Ces offres sont adaptées à toutes les configurations de toitures et concernent bien sûr des systèmes certifiés simples à poser. Leur accompagnement se traduit également par des outils dédiés à la vente, dont des applications digitales, le tout étant lié à un SAV de qualité. Si l’on cherche la meilleure intégration possible en toiture pente, les tuiles photovoltaïques représentent aujourd’hui la plus aboutie et la plus fiable.

Constituées de modules de formes et dimensions variables, elles sont fixées directement sur les liteaux et disposées de manière à se chevaucher. Ainsi, à l’instar des tuiles conventionnelles, elles représentent l’élément principal d’étanchéité de la couverture. Les modèles les plus courants sont composés d’un châssis métallique à double emboîtement, assurant étanchéité et résistance mécanique, et de cellules photovoltaïques protégées par un verre trempé. Ces tuiles sont compatibles avec tout type d’éléments de couverture (ardoises, tuiles plates, tuiles ondulées…) et prennent désormais de la couleur pour une meilleure intégration au site.

Se développe également une offre en intégration totale pour une mise en œuvre identique – hormis la connexion électrique – à celle des petits éléments traditionnels de couverture. Parmi les dernières évolutions, des cellules photovoltaïques encapsulées dans une tuile de verre dont la géométrie ressemble à celle des tuiles grand moule à emboîtement à pureau plat. Dans le même esprit, on trouve une tuile traditionnelle en grès cérame très grand moule à emboîtement, qui intègre un panneau solaire, ou encore une tuile canal en matériau synthétique incorporant un module photovoltaïque. Des procédés qui allient performances techniques, sécurité et esthétique.

Bâtiment de l’Office de l’environnement et de l’énergie (OEE), à Bâle (Suisse), Jessenvollenweider Architektur. La façade photovoltaïque design intègre des menuiseries à cavité fermée (Wictec Modul air Wicona), fabriquées en aluminium bas carbone.
Photo : Wicona

Fixation rapide

Des évolutions également du côté des panneaux photovoltaïques, que ce soit en couverture intégrée ou non. Rappelons que ces procédés sont les plus anciens et qu’ils restent souvent les plus économiques. On constate un fort développement des systèmes sur bacs acier, avec fixations rapides (parfois par clips) des panneaux sur les ondes des bacs. Avantages : simplification de la pose et étanchéité totale. Du nouveau aussi en matière d’esthétique. Les structures des panneaux jouent la discrétion pour obtenir des effets lisses élégants. Les montants des modules disparaissent sous les parcloses pour ne laisser visibles que les lignes essentielles du système.

Autre axe de recherche : des systèmes dédiés aux toitures plates étanchées. Ces procédés autorisent la fixation des modules photovoltaïques rigides sur des membranes d’étanchéité bitumineuse sans percement (voir page 34). En façade, l’offre de solutions photovoltaïques pour l’enveloppe du bâtiment se structure, bon an mal an. Les systèmes sont aujourd’hui légion. À disposition, produits verriers, films photovoltaïques, membranes, bardages avec intégration de cellules photovoltaïques transparentes de dernière génération. L’une des explications tient à la méconnaissance des technologies. Les concepteurs ne savent pas toujours à qui s’adresser – fabricants ou façadiers ?  pour leurs projets et les solutions photovoltaïques à forte valeur ajoutée architecturale ne sont pas mises en avant.

Résultat : beaucoup pensent encore que le photovoltaïque est synonyme de panneau de couleur noir ou bleu, forcément inesthétique. Autre frein possible : la complexité, parfois davantage administrative que technique. Souvent, les entreprises sont obligées d’en passer par la procédure de l’Atex (Appréciation technique d’expérimentation) qui s’avère longue et coûteuse – de quoi refroidir plus d’un maître d’ouvrage. Il faudra nécessairement une prise de conscience de ce côté et limiter les contraintes, si l’on veut généraliser les bâtiments Bepos et décarbonés.

Modules photovoltaïques organiques (OPV) verts Asca. Personnalisés et semi-transparents, ils sont intégrés laminés aux balustrades en verre d’un immeuble d’habitation à Möhringen, en Allemagne.
Photo : Asca
Nouvel Espace social commun de Rennes, agence Béal & Blanckaert. Cent tuiles solaires photovoltaïques Edilians sont intégrées directement sur les liteaux. En coloris rouge, elles sont en harmonie avec la couverture majoritairement en tuiles émaillées blanches.
Photo : Edilians

Intégrer le contexte

Avec ces procédés se pose la question de la manière de bien intégrer cette enveloppe photovoltaïque. La réponse est simple : en la travaillant comme un projet architectural classique. Pour que les projets puissent se multiplier, l’architecte ne doit pas faire de compromis sur la spécificité du bâtiment, que ce soit au niveau esthétique ou thermique. Il décidera si cela doit se voir ou pas ; ensuite seulement viendra la question de convertir les surfaces du bâtiment en surface active. Il faudra aussi prendre en compte les contraintes propres à chaque site, qui sont parfois très spécifiques, et choisir une technologie adaptée. Par exemple, en bord de mer, les fientes de goéland peuvent représenter un réel problème. La réussite d’un projet d’intégration photovoltaïque pour la création d’une façade active tient donc à peu de choses : choisir le système adapté et, le plus important, l’architecte ne doit pas subir le projet, et doit être partie prenante en s’appuyant sur le bureau d’études, ce qui représente une sécurité pour lui. Même chose pour le maître d’ouvrage.

Dernier point : les panneaux photovoltaïques n’ont pas d’intérêt s’ils ne produisent pas ou pas autant qu’escompté. Or certains produits, que les architectes jugent qualitatifs sur le plan esthétique, manquent de productivité. C’est un paramètre qu’il faut intégrer. Il est essentiel que l’installation d’une centrale photovoltaïque soit justifiée par rapport à d’autres ressources renouvelables, comme la géothermie. Dans tous les cas, le système retenu doit être adapté à son contexte : localisation, possibilité de fonctionner en diffus, intégration au projet architectural, gestion de l’échauffement (ventilation), facilité de mise en œuvre…

Photos : Laurits Jensen
Photos : Laurits Jensen

FOCUS

Toiture des bâtiments industriels et commerciaux, photovoltaïque obligatoire

Photo : Sika

Depuis le 1er janvier 2023, la loi Climat et Résilience impose des systèmes de végétalisation ou photovoltaïques sur 30 % au minimum de la toiture pour les bâtiments industriels, logistiques, entrepôts, etc. de plus de 500 m2 d’emprise au sol. Pour ces bâtiments, la cinquième façade est la face cachée d’un projet, celle que l’on néglige parfois. Aujourd’hui, elle prend toute son importance. C’est un espace idéal qui n’empiète pas sur le foncier. Il s’agit d’optimiser cet espace existant qui n’est plus uniquement accessible. Aujourd’hui, la toiture devient une surface productive d’électricité verte, et qui plus est se verdit (végétalisation).

Solutions photovoltaïques disponibles sur le marché de la toiture :

– Soudée en membrane souple (panneaux collés sur la membrane). Inconvénient : sinistres et production faible.

– Lestée. Le panneau photovoltaïque résiste au vent via un support lui-même lesté au bâtiment par gravier ou dalle béton, ce qui entraîne un poids supplémentaire. Solution à réserver aux bâtiments avec structures capables de reprendre beaucoup de charges.

– Thermosoudée. C’est la tendance du marché actuel, car la plus simple et avec un rendement intéressant. Les panneaux sont reliés à une structure non lestée, mais soudée sur l’étanchéité en place, d’où l’absence de charges supplémentaires sur la toiture. Possibilité de s’intégrer sur de l’existant.

Avantages des installations photovoltaïques sur le plan environnemental :

• Produire de l’électricité localement à un tarif compétitif. Aujourd’hui, un système non subventionné est compétitif, compte tenu de l’augmentation du coût de l’énergie.

• Autoconsommation : l’électricité produite localement est consommée directement par l’usage du bâtiment. Actuellement, plus de 50 % des projets industriels et commerciaux sont en autoconsommation. Sur les gros programmes, types bases logistiques où la production d’électricité dépasse les besoins, le surplus est réinjecté dans le réseau.

• Produits de plus en plus sélectionnés avec des bilans carbone raisonnés.

Les avantages au niveau du bâtiment :

Aucun percement de l’étanchéité ni de l’isolant, aucun risque de fuites ni de ponts thermiques à la suite de la pose de la structure photovoltaïque. Systèmes complets et validés pour des bâtiments ICPE ou avec de fortes contraintes incendie.

 

Cet article est extrait du magazine 5Façades 159 disponible en intégralité sur Calameo.