Un décret et ses deux arrêtés, respectivement publiés en mai 2019 et en août 2019, ont simplifié, clarifié et renforcé la réglementation concernant le risque de propagation du feu par les façades. Notamment lorsque celles-ci sont habillées d’un système d’isolation thermique par l’extérieur (ITE), Etics ou façades ventilées. Explications.

La loi Elan du 23 novembre 2018 a établi une nouvelle catégorie d’immeubles dans le Code de la construction et de l’habitation (CCH) : ceux de moyenne hauteur (IMH). Compris entre 28 et 50 m, ils remplacent ce qu’on avait l’habitude d’appeler la quatrième famille. L’objectif ? Combler un vide réglementaire mis en lumière par le rapport du CSTB que le Gouvernement avait demandé suite à l’incendie de la tour Grenfell, à Londres, en 2017. Jusque-là, les tours d’habitation de moins de 50 m et jusqu’à 28 m n’étaient pas vraiment prises en compte, alors qu’elles pouvaient représenter un risque. Pour le législateur, la création de cette nouvelle catégorie devrait aussi faciliter la reconversion des locaux de bureaux en bâtiments d’habitation et favoriser la mixité des usages au sein d’un même bâtiment ou ensemble de bâtiments.

Système combinant une isolation en laine de roche et des panneaux de façade en laine de roche compressée (Rockpanel) incombustibles : mise en œuvre sans bavette de recoupement, option admise par l’IT249, dès lors qu’un laboratoire agréé l’a validée par le biais d’essais Lepir 2.
Photo : Rockpanel

Limiter la propagation du feu par les façades

Suite à la loi Elan, le décret n° 2019-461 du 16 mai 2019 a été publié. Ce dernier porte sur la réglementation, en matière de propagation incendie, des rénovations de façades des bâtiments, IMH (28 à 50 m) ou pas. Il rappelle les objectifs que doivent poursuivre ces rénovations. Sachant que dans ce domaine comme dans le neuf, l’objectif réglementaire est que la propagation du feu par les façades n’atteigne pas le deuxième étage au-dessus du foyer initial. C’est dans ce sens que la réglementation définit des exigences quant aux composants et à la constitution de la façade, exigences qui s’ajoutent à celles liées à la stabilité au feu des bâtiments. Le décret définit les types de rénovations concernées et les solutions de références acceptables. Il s’applique pour toute demande de permis de construire ou déclaration préalable déposée à partir du 1er janvier 2020.

Système d’isolation thermique par l’extérieur (ITE) StoTherm Mineral, optimisé pour la protection incendie : les panneaux de laine de roche sont revêtus d’un sous-enduit mince à base de liant hydraulique.
Photo : STO

Nouveaux critères de réaction feu

Le second arrêté du 7 août 2019 intéresse toutes les familles de bâtiments d’habitation : 1re, 2e, 3e et IMH. Son objectif : mettre à jour les exigences de performance contre l’incendie des revêtements de façade de ces bâtiments, ainsi que le guide d’isolation par l’intérieur. Il acte la désormais impossibilité de construire des immeubles d’habitation comportant, en leurs derniers étages, des duplex ou triplex dont le plancher bas le plus haut est à plus de 50 m, sans tomber dans le champ de la réglementation IGH.

Cela fait suite à un arrêt du conseil d’Etat du 6 décembre 2017, qui avait soulevé une contradiction entre l’article R.122-2 du CCH et l’article 3 de l’arrêté du 31 janvier 1986, relatif à la protection contre l’incendie des bâtiments d’habitation. Il définit également de nouveaux critères de réaction au feu pour chaque famille. Pour les 1re (maison individuelle) et 2e (petits collectifs de type R + 3), pas de changement : la propagation du feu par la façade n’étant pas ici un critère discriminant.

Des évolutions, en revanche, pour les bâtiments de la 3e famille (de 18 à 28 m). Ainsi, l’obligation d’une incombustibilité totale A2 du système complet de façade a modifié de façon importante les techniques habituelles et, de fait, les pratiques des entreprises. L’arrêté reste néanmoins ouvert à l’innovation en laissant aux constructeurs, industriels et organisations professionnelles, la possibilité de prouver l’efficacité globale de leurs systèmes contre la propagation d’un incendie de façade. Ces preuves devant être validées par un laboratoire agréé, sous la forme d’une appréciation de laboratoire (APL), d’un avis de façade ou de guides de préconisations, notamment pour les systèmes Etics PSE et façades ventilées.

Test Lepir 2.
Photo : weber

Essai Lepir 2

L’efficacité des systèmes d’ITE (Etics et façades ventilées) doit être démontrée par une appréciation délivrée par un laboratoire agréé en réaction au feu et en résistance au feu. Elle est jugée sur l’aptitude des composants des systèmes de façade à empêcher, ou non, le développement et la propagation d’un incendie : c’est ce qu’on appelle la réaction au feu. Le risque de propagation verticale est également appréhendé, les niveaux d’exigence étant précisés dans les réglementations applicables en fonction du type de bâtiment et de son usage (voir article principal). À cet effet, un essai de type Lepir 2 (Local expérimental pour incendie réel à 2 niveaux) est réalisé. Il consiste à ériger le système de façade sur deux niveaux et une allège figurant le R+2. 

Les niveaux sont pourvus de deux ouvertures équipées de fenêtres sans ouvrant au rez-de chaussée et de fenêtres complètes au R+1. Un feu est déclenché au rez-de-chaussée à l’aide de deux bûchers. L’essai, d’une durée de soixante minutes, a pour finalité de vérifier la non-propagation par la façade de l’incendie au-delà du R+1. Pendant et après l’essai, les températures sont mesurées dans les matériaux combustibles qui composent le système, à la jonction façade-plancher, dans les lames d’air éventuelles, ainsi que le flux thermique.

Protection par bandes filantes

Daté de juillet 2012, le cahier 3714 du CSTB  « Système d’isolation thermique extérieure par enduit sur polystyrène expansé : condition de mise en œuvre de bandes filantes pour protection incendie »  décrit la mise en œuvre de bandes filantes dans le cas d’une ITE PSE sous enduit. Ce, pour les systèmes faisant l’objet d’un document technique d’application (DTA) ou d’un avis technique (AT), et destinés à être appliqués sur des parois en béton ou en maçonnerie, en travaux neufs ou en rénovation. Des règles également applicables avec des supports béton ou maçonnerie, déjà isolés par l’extérieur lors de la rénovation par surisolation d’un ancien système d’enduit sur isolant.

Dans le cadre d’une ITE par l’extérieur sous enduit, la pose des bandes filantes en laine de roche est réalisée à l’avancement, en même temps que les panneaux PSE. Leur épaisseur est identique à celle du PSE.
Photo : STO

Maîtrise de la propagation du feu par une façade bois multi-étage

Une Appréciation de laboratoire « Bois construction et propagation du feu par les façades » a été réalisée par le FCBA et le CSTB. Mis à jour en 2020 (V3), le document propose des solutions constructives bois fiabilisées par rapport au risque de propagation du feu par les façades. Des solutions en application de l’IT 249 et conformes à l’arrêté de 1986 modifié relatif au bâtiment d’habitation et à l’arrêté du 7 août 2019 modifié relatif aux immeubles de moyenne hauteur rénovés. Les dispositions proposées reflètent l’état de l’art et s’appuient sur des campagnes d’essais réalisées depuis 2012. Le guide s’adresse aux professionnels qui s’engagent dans la construction bois et il a valeur d’Appréciation de laboratoire.

Les façades visées sont constituées d’un bardage ventilé mis en œuvre sur des parois porteuses ou non porteuses, réalisées en ossature bois ou en panneaux bois monobloc, de type panneaux en bois massif contrecollés et contrecloués, ainsi qu’en éléments de maçonnerie ou en béton armé. La V3 du guide est disponible sur le site du Codifab (codifab.fr). L’une des évolutions de cette version concerne l’utilisation des isolants biosourcés.

Cet article est extrait du n°162 du magazine 5Façades disponible sur Calameo.