Inauguré en janvier dernier, à Orléans, le complexe multifonction CO’Met est l’œuvre de trois agences d’architecture. Malgré le partage des tâches et des programmes, celles-ci ont su unir leurs efforts pour concevoir un ensemble sensitif et cohérent, en dessinant une double peau plissée qui rappelle les ondoiements de la Loire.

Photos : Luc Boegly

CO’Met fait l’événement en entrée de ville. Imaginé par les agences Ferrier Marchetti Studio, Chaix & Morel et Populous, dans le cadre d’une conception-réalisation (Bouygues Bâtiment, mandataire), ce nouvel équipement orléanais de 52 000 m2 accueille un programme « trois-en-un », comprenant une enceinte musico-sportive de 10 000 places, un parc des expositions de 20 000 m2 et un palais des congrès de 9 000 m2. À la fois unitaire et fragmenté, il s’étire sur plus de 350 m de long, en lisière de la départementale D2020. La blancheur de ses courbes tranche avantageusement avec les rudimentaires boîtes colorées de la zone commerciale Expo Sud, de sorte qu’aucune confusion ne soit possible entre ce qui relève du monde marchand des grandes surfaces et de l’univers de l’événementiel, du sport et du spectacle. Deux accès, de part et d’autre de l’équipement, sont possibles.

 

Photos : Luc Boegly

Ceux qui se déplacent en tramway arriveront du côté de la départementale, où une contre-allée éloigne le parvis végétalisé de la voie rapide. Les automobilistes se gareront à l’arrière du site, au-delà du bois des Montées, avant d’emprunter une promenade arborée, dessinée par les paysagistes de l’agence Ter. La faille est-ouest, qui sépare l’arena musico-sportive du reste du projet, marque le lieu de l’entrée principale. Supportée par une forêt de poteaux élancés, la passerelle couverte qui la traverse permet un fonctionnement coordonné de l’ensemble des programmes. Tout le rez-de-chaussée du bâtiment sud est occupé par le parc des expositions, divisible en quatre halles autonomes. Logé sur le flanc nord des 1er et 2e étages, le palais des congrès est doté d’un auditorium polyvalent de 1 000 places assises, dont l’acoustique, calibrée pour les conférences, est rendue compatible avec les concerts de musique classique grâce au système Carmen, une solution logicielle développée par le CSTB.

Ombre et lumière

Au-delà des spectacles et des événements sportifs exceptionnels, l’arena se destine à accueillir les matchs de l’OLB, l’équipe locale de basket (Pro B) qui bénéficie également d’une salle d’entraînement en rez-de-chaussée. Sa superstructure est faite de béton en partie inférieure et d’acier en partie haute. « J’ai toujours défendu le côté hybride des constructions, explique, pragmatique, Jacques Ferrier. À l’exemple du parc des expositions, les murs périphériques du rez-de-chaussée (ITI) sont réalisés en béton coulé en place avec la matrice Reckli 2/98 Vltava (lignages verticaux irréguliers). Les ouvertures sur l’extérieur sont peu nombreuses mais généreuses, et leurs emplacements sont soigneusement choisis. Les deux baies principales se composent ainsi de murs-rideaux de deux hauteurs d’étage, qui cadrent la ville (à l’ouest) et le bois des Montées (foyer VIP, à l’est). L’habileté de composition de la double peau de l’arena consiste à gonfler son épaisseur aux quatre coins du plan, afin d’y loger des espaces « mi-intérieurs mi-extérieurs » de facture industrielle, sortes de « boîtes à ombre et à lumière » selon M. Ferrier, où sont déployés les escaliers de secours et les terrasses accessibles au public. « L’enveloppe est l’élément fédérateur et la signature de CO’Met », souligne, de son côté, Pierre Cornil, architecte de Chaix & Morel. On n’en observe pas moins plusieurs variations de formes et de traitements de la transparence, selon les impératifs budgétaires et l’endroit considéré. En ce qui concerne le bâtiment sud, la peau extérieure en tôles d’aluminium laqué se compose d’un profil en courbe simple et d’un seul type de perforation (R28 T55 de Gantois industries). Plus riche du point de vue géométrique, celle de l’arena présente un profil partiellement rectiligne et des angles évasés. Trois types de perforations sont également utilisés, de manière à marquer les concavités et les convexités, et à renforcer les effets ondulatoires de l’enveloppe.

De gauche à droite : l’arena, la faille est-ouest, le parc des expositions (RDC) et le palais des congrès (R + 1 et R + 2), le zénith (construit en 1996 par Chaix & Morel)
Doc. : Ferrier Marchetti Studio (mandataire)

Conte nocturne

« 17 000 m2, soit 170 tonnes de tôle perforée de 3 mm d’épaisseur, sont posés en façade, rapporte Stéphane Pouyot, directeur de l’activité architecture de Gantois industries. Un prototype de 10 x 4 m, comportant un module convexe et deux modules concaves, a permis de valider les rendus. » Dans le sens vertical des ouvrages, les tôles cintrées (1,25 à 2 m de haut) sont liaisonnées par des clames, en ménageant un vide intercalaire de dilatation de 1 mm. Leurs superpositions latérales permettent leur vissage deux à deux sur l’ossature secondaire, qui se constitue de poutres tridimensionnelles renversées vers le ciel, fixées sur les nez de plancher et les voiles béton par des bracons. Au total, l’entreprise Framatec indique avoir mis en œuvre quelque 300 poutres et 45 tonnes de tubes creux d’acier galvanisé.

 CO’Met, le long de la D2020
 Une terrasse de l’arena logée à l’intérieur de la double peau.

Opportunément, Boa Light Studio s’est, lui aussi, saisi de la profondeur de la double peau pour mettre en lumière les façades avec des projecteurs à LED. « La nuit, c’est le moment du conte. Notre rôle est de raconter une histoire, explique Jean-Marie Priol, directeur artistique de l’atelier de conception lumière qui a repris les activités de Yann Kersalé. L’idée n’est pas de compenser ce que la nuit nous empêche de voir, mais de montrer quelque chose qui n’est pas perceptible de jour. » En l’occurrence, il s’agit de restituer les sensations festives des intérieurs, de renforcer les fantômes des ossatures de l’enveloppe et la brillance des tôles laquées de la passerelle. Bref, de créer un paysage onirique de près de 400 m de long.

Tristan Cuisinier

 Murs-rideaux du foyer VIP (vue sur le bois des Montées).

Fiche technique :

Cet article est extrait du magazine 5Façades 160 disponible sur Calameo