Équipement plurifonctionnel, le bâtiment Arena, érigé en béton, s’inscrit dans un quartier en pleine mutation. Ses façades, habillées de bardages en aluminium, sont rythmées par une trame qui varie selon les hauteurs des niveaux, toutes différentes. En couronnement, la toiture épaisse garantit l’isolation thermique et phonique de la grande salle événementielle.

Photo : Axel Coeuret

Au nord du centre-ville de Reims (51), le site Sernam fait l’objet, depuis 2015, d’une requalification qui s’inscrit dans le projet urbain « Reims Grand Centre », destiné à redessiner le cœur de la cité et redonner vie à cette ancienne friche ferroviaire. Pour l’architecte et urbaniste François Leclercq, chargé du plan urbain d’ensemble, il faut « faire émerger un nouveau lieu de centralité, incarné par le complexe aqualudique, la grande salle événementielle et le Boulingrin ». 

Ouverte sur un parvis généreux, l’Arena de Reims (51) se déploie sur 78 m de largeur, 98 m de longueur et 21 m de hauteur. Chacune de ses façades est traitée de manière différenciée. Photo : Jean-Baptiste Delerue

De part et d’autre des voies ferrées s’étend la ZAC Sernam-Boulingrin sur près de cent hectares, où ont été érigés, en 2020, le parking silo République (560 places) de l’architecte Hugo Pace et le centre aqualudique de l’architecte Marc Mimram, puis, en 2022, la salle événementielle Reims Arena, déployée à l’arrière du complexe aquatique, signée de l’architecte Jean-Michel Wilmotte. Également prévues, la construction de bureaux et logements, la réhabilitation du parc des Promenades (1932) par la paysagiste Jacqueline Osty et la création de la Cité de l’effervescence, un centre d’interprétation du champagne qui côtoiera les halles du Boulingrin (1929) restaurées en 2012 par l’architecte François Chatillon.

Une salle compacte, modulable et plurifonctionnelle, qui convient aussi bien aux manifestations sportives qu’aux spectacles ou salons professionnels… Photo : Jean-Baptiste Delerue
Concert d’Orelsan, le 26 mars 2022. Photo : Florent Mayolet / Arena

Vocation sportive et culturelle Le décor planté, revenons à la salle Reims Arena. D’une capacité maximale de 9 000 spectateurs debout et 5 500 assis, elle autorise des configurations multiples.De jauge variable, cette grande salle événementielle (GSE), modulable et plurifonctionnelle, s’adapte aussi bien à des manifestations sportives (basket, tennis, handball, volley, patinoire…) qu’à des salons professionnels, des conventions ou des spectacles (théâtre, concerts…). Livré en février dernier, cet équipement compact –78 m de largeur, 98 m de longueur et 21 m de hauteur – se dresse sur quatre étages. « Chaque niveau propose une programmation lisible depuis l’extérieur et un jeu de circulations qui permettent aux usagers de profiter des vues panoramiques sur la ville, énonce l’architecte Jean-Michel Wilmotte. Ce renforcement de l’horizontalité, par la superposition des fonctions, offre la possibilité de cloisonner les événements les uns par rapport aux autres. » Équipée de gradins fixes et amovibles, la salle centrale est entourée de couronnes d’espaces aux fonctions diverses. Sachant que les hauteurs des niveaux varient suivant les fonctions abritées. Ainsi, le rez-de-chaussée (accueil et technique) s’élève à 3,80 m de hauteur, le R + 1 (spectateurs, loges et salons VIP…) à 6 m, les R + 2 (niveau grand public) et R + 3 (grill et charpente acier) à 2,70 m et le R + 4 (charpente acier et couronnement) à 4,60 m. Plus précisément, au rez-de-chaussée, l’entrée du public (ouest) ouvre sur un parvis et donne sur le hall d’accueil principal doté de bars, boutiques et sanitaires. L’aile nord abrite des sanitaires, vestiaires et halls d’accès pour les sportifs et artistes, ainsi que des salles de réunion et presse, et des caterings.

Cinq strates de volumes en saillie ou en retrait composent les quatre façades de l’Arena. Photo : Soprema / Alex Méaux
Les hauteurs varient selon les fonctions abritées : 3,80 mètres pour le rez-de-chaussée, 6 mètres pour le R + 1, 2,70 mètres pour les R + 2 et R + 3, et 4,60 mètres pour le R + 4. Photo : Soprema Entreprise / Alex Méaux
Les bardages sont rythmés selon une trame qui, de 300 mm en R + 4, passe à 600 mm aux R + 3 et R + 2 et 1 200 mm au R + 1. Lames en aluminium anodisé naturel ou en cassettes planes Alucobond. Photo : Soprema Entreprise

Volumes horizontaux superposés

L’aile sud compte des sanitaires, réserves, dépôts scéniques et locaux techniques, tandis que celle à l’est regroupe une aire logistique, des sas, un poste de sécurité, etc. Le premier étage réunit deux déambulatoires dédiés au public, des salons et loges VIP, des sanitaires, des bureaux et des locaux techniques. Autorisant l’accès aux gradins fixes, le second étage abrite un déambulatoire, des sanitaires, des bureaux et d’autres locaux techniques. Enfin, le dernier niveau héberge les locaux de ventilation répartis autour de la salle. Concernant la structure porteuse de l’ouvrage en béton coulé en place, elle comporte un système poteaux-poutres implanté sur une trame carrée de 6 m, ainsi que des dalles et voiles. Le volume de la grande salle (63 x 80 m) insère un grill à 16,50 m de hauteur et des gradins en béton préfabriqué. Elle est surmontée d’une charpente en acier, formée de treize poutres échelles de 3,50 à 4,50 m de haut. Espacées de 6 m et d’une portée moyenne de 63 m, elles franchissent la largeur de la salle et s’ancrent dans les murs béton de ceinturage. Posé dessus, un épais complexe de couverture empile plusieurs couches de produits en acier et isolant, qui assurent l’isolation thermique et acoustique du lieu. Quant au traitement des façades, il a fait l’objet d’un concept particulier initié par l’architecte, qui « décompose l’ouvrage en cinq strates pour éviter tout aspect massif et élabore un jeu volumétrique qui fait apparaître un nouveau visage de chaque côté du bâtiment, la superposition de volumes horizontaux rappelant de longs balcons filants. »

4 800 m² de bardages posés

Pour alléger l’édifice et le rendre moins monolithique, plusieurs décrochements ont été créés en façade, d’une strate à l’autre, ces volumes en saillie ou en retrait créant des jeux d’ombres et de lumière qui animent l’architecture épurée du bâtiment. Le porte-à-faux du premier étage dégage un ample auvent, qui protège des intempéries les façades du rez-de-chaussée, dont les parties en murs-rideaux aux vitrages clairs correspondent aux zones d’accueil des spectateurs. Ce niveau bas en béton brut fait figure de socle à l’ouvrage. Aux étages, ces strates sont habillées de bardages de tôles pliées d’aluminium anodisé et poli anodisé. Leur modénature se calque sur une trame de 300 mm de large qui se démultiplie au fil des niveaux, afin de créer une composition globale homogène et rigoureuse. « Ce procédé de strates plus ou moins lâches permet à chaque étage d’être autonome et lisible, et d’affirmer son caractère propre », remarque Matthieu Laroussinie, architecte chargé du projet à l’agence Wilmotte. Pour mieux visualiser ces typologies de façade et en rationnaliser leur fabrication et mise en œuvre, plusieurs prototypes ont été montés sur le chantier, comme les bardages en lames d’aluminium anodisé et celui en cassettes en Alucobond, ainsi qu’un mur-rideau. Au total, 4 800 m² de bardages ont été mis en place sur l’ensemble des façades.

Carol Maillard

Par le jeu volumétrique des strates, chacune des façades affiche un visage propre. Photo : Eiffage / Jean-Baptiste Delerue

Bardages en aluminium à géométrie variable À partir du calepinage défini par l’architecte, l’entreprise Soprema a mis en place trois types de bardage devant les trois étages du bâtiment et sur la couronne haute. Rythmant chaque strate, la trame de base de 300 mm de large s’élargit du haut vers le bas. Si le R + 4 affiche des lames en tôle d’aluminium anodisé naturel de 300 mm de large et 220 mm d’épaisseur (ép.1,50 mm), celles des R + 3 et R + 4, semblables mais brillantes pour le R + 3, se déclinent en 600 mm de large (ép.2 mm). Au R + 1, la trame se distend avec des cassettes planes en Alucobond de 1 200 mm d’entraxe. Les lames en forme de V sont inclinées dans plusieurs directions, selon les étages. Elles sont fixées sur des lisses en Z, posées sur une structure en pannes à froid (charpente acier), les fixations étant dissimulées par le recouvrement des lames. Seules quelques lames sont fixées sur des voiles béton. Cette pose a duré six mois.

Doc. : Soprema Entreprise

Couverture acoustique XXL D’une épaisseur de 1,20 m, la couverture acoustique multicouche de la grande salle a été réalisée spécialement par l’entreprise Soprema, qui a mis en œuvre sur la toiture une dizaine de couches aptes à absorber les bruits intérieurs et extérieurs (pluie, grêle…). Le BET de Soprema a pris en compte la note de calcul établie par le BET acoustique Peutz et le fournisseur Phonotec, pour mettre au point une solution technique adaptée. Mis en place sur le support de charpente acier du toit, l’ensemble superpose un premier complexe intérieur (48 kg/m²), formé de plateaux métalliques perforés prélaqués, de deux couches d’isolant en laine de verre (20+130 mm), de panneaux d’agglomérés, de plaques bitumineuses et d’un isolant en laine de roche (200 mm). Il reçoit une structure secondaire à potelets et pannes d’acier, sur laquelle est fixé un complexe supérieur (55 kg/m²) composé de bacs de support en acier galvanisé, de panneaux agglomérés et acoustiques, d’une feuille bitumineuse et d’une membrane d’étanchéité de finition en PVC gris clair. Ces travaux se sont déroulés de septembre 2020 à janvier 2021.

Doc. : Soprema Entreprise

Photo : Luc Castel/Rec Paysage

Jean-Michel Wilmotte, architecte

« Plus la strate est haute, plus la trame du bardage se resserre. »  

« La particularité de l’Arena est de se situer au cœur de la ville de Reims. Il fallait non seulement répondre à la forte contrainte programmatique d’un tel équipement, mais également intégrer sa forme dans ce contexte urbain. Plutôt que de proposer une volumétrie massive et unique, notre parti pris a été de travailler avec un ensemble de cinq strates horizontales glissant les unes par rapport aux autres, chacune d’entre elles correspondant à un élément du programme de la grande salle événementielle. Ce jeu de composition, d’empilement de strates horizontales de différentes hauteurs, en retrait ou en porte-à-faux, affine la volumétrie du bâtiment et propose un équipement sculptural aux lignes élancées. La première strate du rez-de-chaussée agit comme un socle en béton brut, où seules les zones d’accueil des spectateurs sont signifiées par de larges murs-rideaux vitrés. Les autres strates du projet sont habillées d’un bardage constitué de tôles pliées en aluminium anodisé et poli anodisé, dont la trame varie en fonction de la strate. Plus la strate est haute, plus la trame du bardage se resserre. Chaque étage identifiable possède son caractère propre, tout en appartenant à la même famille. Ce choix de matériaux permet au bâtiment de s’intégrer au mieux dans son environnement, en réfléchissant la couleur du ciel et les bâtiments aux alentours. Cet équipement, qui apporte une nouvelle offre à travers une programmation variée, participe au rayonnement de ce nouveau quartier à l’échelle de la métropole rémoise et de sa région. »


Construction de la Grande salle événementielle (GSE) Reims Arena (Marne)

  • Maîtrise d’ouvrage : Eiffage Concessions Exploitant : GL events
  • Maîtrise d’œuvre : Wilmotte & Associés
  • BET CFO-CFA / plomberie / VRD/ thermique / ingénierie environnementale et énergétique : BEA Ingénierie
  • BET structure enveloppe : Terrell Group
  • Scénographie : Scène Évolution
  • BET acoustique : Peutz
  • Entreprise générale : Eiffage Construction Champagne-Ardenne, avec Soprema Entreprises Reims (sous-traitant couverture et bardages de façade)
  • Surfaces : 11 940 m² SDP

 

Ces articles sont extraits de 5Façades 156, découvrez le numéro en intégralité sur la plateforme Calameo.com