Imaginé comme un cabinet de curiosités, le musée Dobrée va rouvrir après deux ans de travaux. Atelier Novembre a réglé l’éclectisme architectural avec des ouvrages en acier autopatinable.
Photo : Paul Pascal/Département de Loire-Atlantique
Cela faisait treize ans que les amateurs d’art attendaient la réouverture du musée Dobrée dans le centre-ville de Nantes. De même, cela faisait plus de trente ans que le département de Loire-Atlantique, propriétaire du musée depuis 1895 après la donation du riche collectionneur Thomas Dobrée, espérait faire aboutir la restructuration du site.
Depuis le début des années 1990, trois projets sans lendemain se sont en effet succédé : en 1992, en 2004, puis en 2011 avec Dominique Perrault, dont le projet fut retoqué en raison d’un recours en annulation du permis de construire. En 2016, nouveau concours, nouveau lauréat : c’est Atelier Novembre qui est finalement chargé de mener à bon port l’extension-restructuration du musée. Avec un « ouf » de soulagement du côté du département : l’inauguration publique a eu lieu le 18 mai 2024 !
Le parvis d’accès au musée.
Photo : Paul Pascal/Département de Loire-Atlantique
Éclectisme spatio-temporel
La collection Dobrée, riche de 135 000 pièces, couvre 5 000 ans d’histoire, des temps préhistoriques au 20e siècle. Elle porte également sur les cinq continents, de l’Amérique précolombienne à l’Océanie. L’assemblage de bâtiments hétérogènes reflète cet éclectisme spatio-temporel. Parallèle à la rue Montesquieu, le palais néo-médiéval, construit au 19e siècle par Thomas Dobrée (1810-1895) pour accueillir sa collection, est réservé à l’exposition permanente. Au centre du site, le manoir de la Touche, ancienne demeure épiscopale du 15e siècle, abrite les expositions temporaires.
Du côté de la rue Voltaire, le bâtiment Ferré du début des années 1970 est le siège des fonctions servantes, de l’administration et de l’entrée principale, où l’on trouve la salle de conférence, le café et la boutique. Atelier Novembre a complètement reconfiguré ses deux niveaux inférieurs en jouant sur les transparences et la déclivité naturelle du terrain. L’accès se situe désormais au niveau le plus bas, dans la continuité du parvis en pente douce et de la place Jean-V. « Nous avons gagné le concours parce que nous préservions l’héritage bâti et ne démolissions pas le bâtiment brutaliste de 1973 », souligne l’architecte Marc Iseppi.
À gauche, le palais du 19e siècle. À droite, le manoir de la Touche du 15e siècle et son escalier panoramique.
Photo : Roberto Giangrande/Atelier Novembre/Atelier Moabi
Fil rouge
La question de la cohérence d’ensemble n’en demeurait pas moins difficile à résoudre. C’est vers l’acier autopatinable, « ciment » de l’existant, que les architectes se sont tournés pour garantir l’unité du lieu, commander les changements de niveau et accompagner les transitions entre l’intérieur et l’extérieur. Assigné au rôle de fil conducteur, l’acier Corten est le matériau quasi exclusif de toutes les extensions du musée. Il divise les espaces de la rampe et du parvis. Il est utilisé en surtoiture au-dessus du hall d’accueil, du café et de la boutique.
Il suture les entrées et les sorties sur le parvis et la cour centrale. Il est également employé en brise-soleil dans l’extension vitrée du manoir, dont l’escalier panoramique à volées droites permet d’embrasser toute la parcelle. Mis en œuvre à partir de deux tôles assemblées par des « U », ces brise-soleil en acier autopatinable sont vissés sur des tubes carrés 80 x 80 mm en acier laqué RAL 7022, eux-mêmes fixés sur les poteaux béton par l’intermédiaire de pièces métalliques. Impossible à réaliser en Corten, la couverture à 60° est faite de cuivre préoxydé (teinte gris-brun, au lieu de vert-de-gris).
Les menuiseries extérieures sont réalisées en aluminium laqué, RAL 7022, comme les tubes carrés d’ossature secondaire. De son côté, le bâtiment Ferré a donné beaucoup de fil à retordre aux ingénieurs, en raison de ses insuffisances structurelles. Les panneaux de façade en béton cannelé étaient par exemple impossibles à restaurer, à cause d’un problème d’oxydation des aciers. Il n’était pas non plus possible de les remplacer sans alourdir la structure. La maîtrise d’œuvre s’est donc tournée vers une solution enduite StoVentec de couleur grise, dont les cannelures ont été réalisées sur mesure.
Tristan Cuisinier
Axonométrie montrant les interventions en acier autopatinable.
Doc. : Atelier Novembre
Maîtrise d’ouvrage : Département de Loire-Atlantique
Architecte mandataire : Atelier Novembre
Architecte du patrimoine : Atelier Donjerkovic
BET TCE : Oteis
SDP : 7 400 m2
Calendrier : 2017 (concours), 2021 (démarrage du chantier), janvier 2024 (livraison), 18 mai 2024 (inauguration publique)
Cet article est extrait du magazine 5Façades 167 disponible sur Calameo.