Maternité Xiamen Humanity, à Montreux (CH) – architecte Vincent Zhang. Les mailles de la façade gèrent à la fois l’ensoleillement, l’ombrage et la ventilation.

Par définition, un bâtiment est exposé au soleil. Ce serait dommage de se priver de ce qu’il peut apporter à la construction : lumière naturelle, chaleur en hiver, énergie… Mais il faut savoir aussi s’en protéger. En complément d’une conception bioclimatique, il existe de nombreux produits, systèmes et équipements techniques pour assurer cette fonction. Autrement dit, nous parlons protection solaire, ombrage et confort d’été.

Dossier réalisé par Stéphane Miget

Confort d’été, contrôle solaire et ombrage

Avec l’énergie et le carbone, le confort d’été est un point clé de la RE 2020 pour les bâtiments neufs. La bonne réponse consiste à s’intéresser à la conception architecturale (Bbio) et, outre la nature de l’enveloppe, aux moyens de se protéger du soleil.

Bien gérés, les apports solaires assureront plus de 50 % du chauffage et de l’éclairage dans le bâtiment. Ce qui signifie qu’il est indispensable de contrôler les niveaux d’énergie et de lumière pénétrant par les baies vitrées en fonction des saisons. Car si la lumière naturelle est bénéfique aux occupants et favorise les économies d’énergie, elle ne doit pas devenir source d’inconfort, de surchauffe ou d’éblouissement. C’est là qu’interviennent les systèmes d’ombrage et de contrôle solaire.

Siège Cuynat Construction, à Grenoble – Milk Architectes. En harmonie avec le béton brut, les stores Soloscreen, de Griesser, résistent aux vents modérés et peuvent s’étendre sur des surfaces importantes. Sur le plan environnemental, la barre de charge est remplie de sable plutôt que d’un matériau métallique.
Photo : Griesser

À ne pas confondre avec ceux dédiés à l’occultation qui empêchent par obturation la lumière de pénétrer dans le bâtiment. Dans le cas qui nous intéresse, l’objectif est, au contraire, de la laisser passer, tout en réduisant les effets négatifs du soleil. Plus concrètement, elle va rentrer là où on le souhaite, au moment où les occupants en ont besoin et sans éblouissement. Arbitrage et compromis, ce sont donc les deux maîtres mots qui reviennent le plus souvent lorsqu’on s’intéresse au solaire passif et au contrôle solaire.

Indissociable du confort thermique et de la qualité d’usage d’un bâtiment, cette notion n’est pas nouvelle. En revanche, on en saisit toute la portée lorsque l’on recherche l’efficacité énergétique. Lors de la conception proprement dite, l’architecte a un rôle prépondérant à jouer et jamais le terme « bioclimatique » n’aura eu autant de sens. L’objectif : contrôler l’ensoleillement en favorisant les apports solaires lorsqu’ils sont nécessaires et en les empêchant lorsqu’il y a risque de surchauffe.

En gros, la forme du bâtiment se définit en fonction de la course du soleil et des saisons en intégrant, ou pas, des masques architecturaux. Les outils informatiques, particulièrement ceux de simulation, s’avèrent d’une grande utilité. Cette recherche du contrôle solaire se remarque sur les bâtiments de dernière génération. Soit des casquettes en couverture, des jeux avec les terrasses, loggias et balcons, créant autant d’espaces tampons, ou encore des brise-soleil fixes ou mobiles qui signent l’esthétique des bâtiments de ce premier quart de siècle.

 Stream Building de PCA Streeam, Paris 17e. Une partie des protections solaires sera assurée par les végétaux : faille végétale au sud et façade houblonnée au sud-est. La houblonnière offre une protection thermique passive, lumière en hiver, ombre en été.
Photo : Salem Mostefaoui

Vitrage à contrôle solaire

De cette architecture découleront les actions à mettre en place pour le contrôle solaire, qui assurera le confort des utilisateurs, tout en autorisant les entrées d’apports gratuits (thermique en hiver et lumière naturelle toute l’année). Du côté des solutions techniques, l’offre est pléthorique : matériaux transparents et translucides, stores, volets roulants, brise-soleil… Et il n’y a pas de concurrence entre les différentes solutions, juste une complémentarité.

Bureaux Vinci, à Nanterre – Kingspan brise-soleil vitré en façade. Dotés de lames fixes ou orientables, les brise-soleil autorisent une gestion optimale des apports énergétiques : ils bloquent une partie du rayonnement solaire et limitent ainsi l’apport excessif de chaleur en été, ou apportent de la lumière naturelle en hiver.
Photo : Kingspan

Première option technique : les vitrages, notamment ceux à couches (VIR) qui ont une action directe sur le rayonnement. Leurs caractéristiques ne se limitent pas à leur qualité thermique pour le confort d’hiver (faible émissivité). Ils ont un rôle de plus en plus important dans le confort d’été, en réduisant les apports énergétiques excédentaires. Il existe des VIR dotés de couches de protection solaire – dans ce cas, la transmission lumineuse est de l’ordre de 70 à 75 % – ou des produits colorés qui ne laissent pénétrer que 40 à 50 % de lumière.

Ils sont utilisés dans toutes les situations où l’apport excessif d’énergie solaire peut poser problème : grandes baies vitrées, vérandas, verrières, façades. Les dernières avancées portent sur des vitrages à triple couche d’argent déposée sous vide pour des applications en façade. Ces produits améliorent encore les performances en combinant une transmission lumineuse de l’ordre de 60 %, un facteur solaire proche de 30 % et un très bon niveau d’isolation thermique. 

 Ilot Féval, Jean-Paul Vigier et Associés, le long des voies de chemin de fer à Rennes : trois édifices et trois résilles différenciées, conçues et dessinées de façon à assurer la protection solaire la plus efficace en fonction de la course du soleil et des saisons.
Photo : Takuji Shimmura

À disposition également, des vitrages à contrôle solaire dynamique, appelés aussi « électrochromes ». Ces derniers ont la capacité de réguler le rayonnement solaire en s’obscurcissant plus ou moins, à la demande ou automatiquement. Cette technologie permet de conserver toutes les qualités du vitrage, sans les inconvénients majeurs que sont l’éblouissement et la surchauffe. Et ce, quelles que soient l’orientation des façades et la saison.

Alternative aux vitrages, le polycarbonate est de plus en plus utilisé en raison de sa résistance aux impacts, de sa légèreté, de sa transparence ou de son opalescence. Ce thermoplastique est proposé sous la forme de plaques alvéolaires de plus ou moins forte épaisseur (de 4 à 55 mm) et plus ou moins transparentes (jusqu’à 82 % de transmission lumineuse). Comme pour le verre, les fabricants ont travaillé leurs produits : isolation thermique, résistance aux UV, transparence et contrôle solaire. Par exemple, les panneaux de dernière génération bénéficient d’une couche spéciale coextrudée sur leur face intérieure, qui atténue les rayons solaires infrarouges. D’où une limitation de la transmission de chaleur et une pénétration maximale de lumière.

Brise-soleil terre cuite Terreal. La maîtrise des apports solaires ne peut se réaliser qu’en ayant connaissance d’un ensemble de critères : performance de la baie concernée, zone climatique, exposition, usage du bâtiment, type de store ou brise-soleil.
Photo : Terreal

Les membranes composites ajourées, plus communément appelées « toiles textiles », sont aussi utilisées pour leur capacité à laisser passer la lumière naturelle et à créer un ombrage. À des degrés variables, elles apportent un éclairage naturel de qualité dans les volumes intérieurs, avec une luminosité bien répartie même par faible luminosité extérieure. Elles conservent néanmoins une opacité totale vis-à-vis de l’extérieur. Ces toiles sont constituées d’un support résistant tissé – polyester, fibres de verre ou fibres de Kevlar – et d’une enduction imperméable – PVC, téflon ou encore silicone. Le composite polyester/PVC est de très loin le plus prisé en France. En revanche, elles sont uniquement dédiées à la protection solaire et ne sont pas adaptées pour la thermique.

Ombrage

Avec les systèmes d’ombrage se pose la question de leur intégration en façade. Car si l’amélioration du confort d’été impose l’utilisation d’une protection solaire efficace et pérenne, il n’est pas question que celle-ci dénature la façade. C’est pourquoi la mise en place de brise-soleil est aujourd’hui réfléchie très en amont des projets. D’ailleurs, certaines façades sont, à elles seules, des brise-soleil. 

Immeubles de bureaux de DCM Grobbendonk (BE) / Schellen Architecten – Protection solaire et ombrage avec une lame DucoSun Wing (Duco) en forme d’aile d’avion pivotant en fonction de la course du soleil.
Photo : Duco

Corollaire de cette protection, l’association d’éléments mobiles à des automatismes, tels des systèmes de gestion des niveaux d’éclairement. C’est là qu’entrent en scène les automatismes et la gestion technique du bâtiment (GTB / GTC). De plus en plus performants et sophistiqués, ils assurent une meilleure gestion des installations. Par exemple, des commandes infrarouges associées à des systèmes d’automatisme vent/soleil, dont les capteurs analysent en temps réel les conditions climatiques, la vitesse du vent et les besoins en lumière. D’autres solutions, plutôt réservées au secteur tertiaire, consistent à intégrer dans des doubles vitrages, des stores vénitiens à lamelles orientées par commandes magnétiques. Avec un capteur de lumière et de température, on obtient un système automatique de régulation thermique. D’autres, beaucoup plus simples et plutôt destinés à l’habitat, conjuguent des volets roulants ou battants à un système de gestion domotique. Dans tous les cas, l’objectif est de choisir au mieux les performances de la paroi vitrée et le mode de gestion des protections mobiles pour optimiser les consommations : chauffage, climatisation et éclairage.

Grâce à un tissage en diagonale, certains tissus pour store intérieur ou extérieur apportent la transparence et protègent de la chaleur et de l’éblouissement – jusqu’à 96 % de l’énergie solaire rejetée. Satiné 5500 Mermet.
Photo : Mermet
Sous l’action d’un faible courant électrique, les vitrages électrochromes adaptent la transmission lumineuse et calorifique à l’ensoleillement et à la température ambiante d’un bâtiment.
Photo : SageGlass

que dit la RE 2020 ?

La RE 2020 introduit deux évolutions majeures par rapport à la RT2012.

1/ La Tic (température intérieure conventionnelle), indicateur réglementaire de la RT 2012, est supprimée, car insuffisamment significative pour mesurer l’inconfort perçu par les occupants. Elle est remplacée par une nouvelle exigence : les degrés-heures d’inconfort (DH). Cette méthode de calcul prend en compte les effets du changement climatique sur les bâtiments : évolution future des températures, vagues de chaleur plus fréquentes, plus intenses et plus longues. Ce calcul est réalisé à partir de données météorologiques, sur la base de la canicule d’août 2003 et en fonction des zones géographiques.

Concrètement, elle définit deux seuils à partir desquels le bâtiment est considéré comme inconfortable pour ses occupants : 26 °C la nuit et entre 26 et 28 °C la journée (entre 7 h et 22 h, l’été). Elle introduit aussi deux seuils d’inconfort basés sur l’indicateur DH : un seuil maximal DH Max (1250 DH) à ne pas dépasser et un seuil bas de 350 DH. D’où trois options possibles :

  • Le bâtiment, dont l’indicateur DH est inférieur à 350 DH, est déclaré conforme et n’engendre pas normalement d’inconfort en été.
  • Le bâtiment, dont l’indicateur DH est supérieur au DH Max, est déclaré non réglementaire et présente un taux d’inconfort d’été trop important.
  • Le bâtiment, dont l’indicateur DH est compris entre 350 DH et le DH Max, est considéré comme réglementaire, mais présente un risque d’inconfort pour ses occupants en cas de canicule. Dans ce cas, il faudra prendre en compte les consommations de refroidissement et agir pour se rapprocher du seuil bas d’inconfort. 
Livré en juillet 2021, Tribord Sailing Lab affiche sa contemporanéité par sa casquette de brise-soleil en aile d’avion de Tellier Brise-Soleil. Extrudés en usine, ils sont mis en œuvre sur une structure porteuse métallique.
Photo : Tellier Brise Soleil

2/ L’inconfort d’été est désormais pris en compte via le Bbio, lequel a été renforcé de 30 % par rapport à la RT 2012. L’objectif est de consolider la performance énergétique statique des bâtiments par une meilleure conception : davantage d’isolation en tenant compte de l’inertie, meilleure protection de l’ensoleillement direct par des écrans, stores, ou encore végétalisation. À noter par rapport à la RT 2012, les besoins de froid sont désormais calculés dans le nouveau coefficient réglementaire Bbio. À ce titre, la RE 2020 apporte un garde-fou supplémentaire, les protections solaires étant étendues à l’ensemble des baies, et non plus uniquement aux chambres. La climatisation n’est pas interdite, mais elle ne peut s’envisager sans une conception du bâti optimisée – notamment en termes bioclimatiques.

Cet article est extrait du magazine 5Façades 161 disponible sur Calameo.